« Vive la crise ! »

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la boîte à bonus est réouverte

Elles ont replongé, dirait-on. Comme ces malades qui sortent d’une brève cure de désintoxication pendant laquelle ils ont juré leurs grands dieux que « jamais plus », et qui s’arrêtent aussitôt au bistrot du coin. Après les banques américaines c’est, en France, la BNP qui s’apprête à verser 1 milliard d’euros de bonus à ses traders. Combien pour la Société générale, elle aussi bénéficiaire cette année ? Combien de banques dans le monde, à Londres, à Singapour, à Francfort, à Zurich, gavées d’argent public il y a seulement quelques mois et qui vont de nouveau ouvrir les parachutes dorés, aligner les stock-options, payer avec des millions l’indifférence aux drames du monde des petits génies de l’informatique et des docteurs Frankenstein de la finance.

Ils étaient devenus humbles. Ils avaient laissé leur Ferrari au garage. Ils craignaient pour leur avenir. On en a même vu qui faisaient leurs cartons avec aux yeux des larmes de dépit et parfois de repentir. Et combien de financiers de haut vol, d’affairistes notoires qui semblaient touchés par la grâce ? Combien de politiques, n’est-ce pas, stigmatisant la folie financière, la course à la spéculation, aux premiers rangs desquels Nicolas Sarkozy.

Les chiffres sont hallucinants. Aux États-Unis, des millions de familles ont perdu leur logement ou sont en passe de le perdre, plus de 1 000 milliards de dollars d’argent public sont venus soutenir les banques. Et ce sont celles-là même qui ont bénéficié des milliards de dollars de l’État, c’est-à-dire des contribuables, qui ont versé des milliards de dollars de primes à leurs cadres. Parce qu’elles les aiment et qu’ils sont méritants ? Non, mais parce que les reniements et le cynisme, ça se paye.

En France où des salariés jetés à la rue se battent pendant des semaines pour obtenir des primes de départ de quelques milliers d’euros, les bonus de la BNP représentent 59 000 euros par salarié. Ce n’est là évidemment qu’une moyenne derrière laquelle se retranche le médiateur du crédit. On se souvient, il a été nommé pour que les banques respectent un code de bonne conduite. « Si le milliard est réparti entre les salariés, je suis content pour chacun des salariés. Moi, ce qui m’intéresse, c’est de savoir si on a de nouveau des errements de rémunération. »

Il fait semblant de penser que, 59 000 euros par salarié, c’est une petite somme. Mais c’est quatre années de SMIC ! Il sait bien que les « errements » dont il parle ne peuvent qu’exister. Mais il feint surtout d’oublier que, l’an passé, 5 milliards d’euros d’argent public ont été versés à la BNP ! De son côté la BNP assure, avec toute la candeur d’une sainte-nitouche des coffres-forts, qu’elle n’a fait que respecter scrupuleusement les règles établies par le G20. S’il fallait une confirmation de ce que ce fameux sommet où Nicolas Sarkozy était devenu un Zorro de la moralisation du capitalisme n’avait décidé que de broutilles, c’est chose faite. C’est cela, la lutte mondiale contre les phénoménales fuites en avant financières qui ont déclenché la crise que payent et que n’ont pas fini de payer les peuples ?

Une telle tartufferie, nationale et planétaire, donne la nausée. Mais l’écoeurement et l’indignation ne suffisent pas. Souvenons-nous de François Fillon, déclarant qu’il fallait aider les banques mais laisser ensuite les banquiers « faire leur métier ». Eh bien ils le font. Ce n’est pas de l’addiction bien sûr, on l’a bien compris. C’est la logique du capitalisme. Le gouvernement ne voulait pas aider les victimes de la crise mais sauver ses responsables, pour repartir. Pour repartir même mieux qu’avant en ayant au passage assoupli l’économie et l’échine des salariés, ouvert plus de champ encore aux capitaux dominants. Et déjà on sable le champagne dans certains conseils d’administration : « Vive la crise ! ».

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