Présidée par Claude COLLIN, la séance a vu un discours introductif de sa part, puis une intervention de Sébastien JUMEL (en pièce jointe) au nom du groupe communiste avant l’élection du nouveau Président Didier MARIE
Intervention de Claude COLLIN :
Mesdames, Messieurs, Chers Collègues,
Nous allons au cours de cette session élire le président mais auparavant je tiens à vous féliciter chers collègues qui avez été réélus et également félicitations aux nouveaux collègues pour qui c’est leur première séance.
Avant de procéder à cette élection, je voudrais rendre hommage à notre collègue André Duroméa récemment disparu. Né au Havre, le 5 septembre 1917, après un CAP de tourneur, il était entré en 1933 comme apprenti dans l’atelier de tôlerie serrurerie de son père. La montée du fascisme au début des années 30, l’arrivée d’Hitler en Allemagne en 33, les manifestations de l’extrême droite de février 34, la victoire du Front Populaire au printemps 36, l’occupation de l’usine Bréguet du Havre dès le 11 mai, véritable signal du vaste mouvement de grève et d’occupation de leur entreprise par les salariés, sont autant d’événements qui ont compté dans la prise de conscience de l’adolescent qu’il était.
Et c’est à la fin de l’année 1936, devenu ajusteur à la CEM, qu’il donne son adhésion au Parti Communiste Français. Il avait 19 ans. C’était une période intense où les salariés gagnaient la semaine de 40 heures et 15 jours de congés payés. Mais la fin des années 30 allait voir des changements profonds, avec l’opposition affirmée d’une partie de la bourgeoisie française, la décision de « non intervention » du gouvernement devant l’agression fasciste en Espagne… sans oublier, à partir de 1938, la répression des militants, la remise en cause des conquêtes du Front Populaire, la marche vers la guerre.
Homme de convictions forgées, témoin et acteur d’événements majeurs, André va se révéler un homme de courage exceptionnel, dans le Havre occupé de 1940, dès l’automne, aux côtés de René Cance, il participe à la reconstitution des liens entre les membres du Parti Communiste interdit. Puis il aura la responsabilité de la lutte armée. Fin 42, il deviendra responsable militaire départemental et en août 43, l’état-major des FTP l’envoie dans l’ouest, comme commandant de 18 départements qui vont de la Manche aux Basses Pyrénées ; puis il devient responsable des opérations sur la Région Parisienne. C’est là qu’il apprendra sa condamnation à mort… Le 7 mars 44, il est blessé et arrêté.
Gestapo, interrogatoires ; fin juillet, c’est la déportation. Des mois d’enfer et d’angoisse, le départ pour le port de Lübeck, où il échappera encore, et de peu, à la mort, puis la fin du cauchemar, le retour en France.
L’homme qui rentre de cet enfer a 28 ans. Reprendre le travail n’est pas aisé. Ce fut très vite la guerre froide ; l’emploi existait, mais, bizarrement, le nom de « Duroméa » provoquait souvent des refus.
André Duroméa reprend ses activités militantes. En 1947, il est élu conseiller municipal du Havre. Il le restera jusqu’en 1995. 48 ans au service de sa ville, au service du « peuple du Havre ». Il sera de toutes les luttes, pour le ravitaillement de la population, pour le logement des familles, pour l’amélioration de la situation des salariés, pour la paix, contre les guerres coloniales, la ville à reconstruire, comme le port, comme l’activité industrielle. Après une 1ère victoire aux élections municipales en 1956, la gauche conduite par René Cance et André Duroméa revient en 1965 à la direction de la ville. André Duroméa devient aussi conseiller général du 3ème canton du Havre en 1958. Il le sera jusqu’en 1976. En 1967, il est élu député et en 1971 devient maire. La ville, après la phase de reconstruction, doit viser celle de la croissance. Comme dans les années 30, il est un artisan inlassable de l’union. Au cours des 4 mandats qu’il conduit, c’est plus d’une centaine d’élus, communistes, socialistes, radicaux de gauche et hommes de progrès, qui chemineront auprès de lui, participant activement à ce travail commun, à cette volonté collective de développer le Havre en étroite concertation avec les habitants, le monde associatif. Quoi d’autre, mieux que « Juin dans la rue », pour illustrer ce mouvement : les habitants, citoyens et acteurs dans leurs quartiers.
Parlementaire et maire d’une grande ville industrielle et portuaire, il eut aussi à affronter des crises économiques et sociales sévères, notamment dans les domaines industriel et maritime, dont celle du « France » bien sûr. Toujours, les salariés en lutte savaient trouver auprès de lui un soutien indéfectible. Homme de conviction et de courage, André Duroméa était aussi d’une grande humanité dans ses rapports avec les gens de toutes conditions. Il était respecté par tous, y compris par ses adversaires politiques. Le Président de la République, Jacques Chirac, lui remettra, à l’Elysée, la croix de Commandeur dans l’ordre de la Légion d’Honneur.
Dans les dernières lignes de son livre, il écrit «Je sais que viendra le temps où notre peuple saura s’unir, se rassembler pour imposer une autre société faite de justice, de liberté, de démocratie et de paix ».
Nous transmettons à sa femme, sa famille et ses proches toutes nos condoléances.
Je vous demande en sa mémoire d’observer une minute de silence.
Avant de procéder à l’élection du Président de notre assemblée, permettez-moi de constater que notre majorité a encore progressé et que cette situation, si nous pouvons en être très satisfaits, nous donne encore plus de responsabilités.
Car ce résultat, s’il atteste de la confiance qui nous a été témoignée, se place dans un contexte particulièrement difficile pour une grande majorité de notre population. La France est riche, avec un PIB de 2000 Milliards d’euros, mais les richesses sont accaparées par quelques- uns au détriment du plus grand nombre, en proie à des difficultés de vie accrues. Et je crois que c’est le mécontentement de la majorité de nos concitoyens qui s’est exprimé. A l’encontre de la droite gouvernementale d’abord, qui a subi un revers électoral, mais un mécontentement qui nous interpelle tous, quelque soit notre appartenance politique, car il s’est exprimé aussi par une abstention record et par un glissement des électeurs de droite vers l’extrême droite qui, même si sa progression est contenue, a été présente au 2ème tour dans plusieurs de nos cantons.
Si la droite et sa politique ont été sanctionnées, l’absence de perspectives de changement ressentie par beaucoup de nos concitoyens explique pour une grande part ce désenchantement général et pose la question d’une alternative crédible à gauche.
Pour ma part je pense qu’elle ne pourra voir le jour qu’en répondant aux aspirations des classes populaires.
C’est pourquoi je pense qu’il est nécessaire, au plan départemental, de ne pas abandonner la politique que notre majorité avait engagée il y a maintenant 7 ans, sans réduction de voilure malgré le resserrement important de nos moyens financiers, de respecter les différentes composantes de cette majorité et avec des choix, des priorités qui soient réellement co-élaborés et partagés :
– pour que notre département continue d’être un pôle de résistance
– pour qu’il soit concrètement le « bouclier social » en matière de solidarités qui protège les Seino Marins les plus fragilisés
– pour qu’il soit un outil de défense et de promotion de l’activité économique et industrielle
– pour qu’il soit un outil de défense et de promotion des services publics contre le déménagement des territoires et pour un aménagement juste de ces territoires.
L’austérité ne doit pas franchir les portes du département et nous avons des craintes à ce sujet.
C’est pourquoi également il m’apparaît indispensable, au plan national, d’engager un mouvement de reconquête pour 2012 avec les élections présidentielles et législatives.
Pas une reconquête de postes ou de sièges pour une simple alternance politicienne, mais une reconquête du politique sur l’économique, car ce n’est pas aux marchés financiers de fixer les règles de la vie en société et on ne peut pas compter sur eux pour répondre aux problèmes de nos concitoyens, leur redonner espoir et une vie meilleure. Une reconquête de l’humain sur la finance, avec un projet de transformation sociale qui se donne les moyens de ses ambitions par une nouvelle répartition des richesses, toutes les richesses.
Nous avons j’en suis convaincu l’obligation de créer les conditions de cette réussite.