Non, les paradis fiscaux, c’est pas fini !

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Nicolas Sarkozy a décrété leur mort, mais un peu vite ! Selon le CCFD-Terre solidaire, l’évasion fiscale des multinationales vers la Suisse, Monaco et autres îles Caïmans se chiffre à 125 milliards d’euros. Le G20, lui, regarde ailleurs…

 

C’est en toute légalité que le groupe Unilever, propriétaire de l’usine Fralib à Gémenos (Bouches-du-Rhône) occupée par des salariés opposés à sa fermeture, a fait en sorte qu’une soixantaine de millions d’euros échappent chaque année au fisc français. Pourtant, fin 2009, la France s’est bardée d’une série de lois censées lutter contre l’évasion fiscale des entreprises implantées sur son territoire vers des paradis fiscaux. Or, en septembre de la même année, à la veille du sommet du G20 à Pittsburgh, Nicolas Sarkozy décrétait : « Les paradis fiscaux et le secret bancaire c’est fini ! » De fait, la liste française de ces « trous noirs de la finance internationale » ne comporte plus, en 2011, qu’une quinzaine de contrées exotiques, pour la plupart des îles perdues au milieu du Pacifique. En conséquence de quoi, pour le ministère français du Budget, aucun des États de l’Union européenne n’est un paradis fiscal. Pas plus d’ailleurs que les pays qui ont signé avec la France un traité d’échange de renseignements. Parmi ces derniers, la Suisse où, près de Zurich, Unilever a implanté sa filiale USCC, un centre de profits, reléguant son usine de production d’infusions Lipton et Éléphant au rang de simple façonnier. D’où son bras d’honneur au fisc français.

Pour être juste avec l’incivique Fralib-Unilever, il faut souligner, avec le CCFD-Terre solidaire qui en a fait le recensement en décembre 2010, que 4 359 filiales de dix des onze plus grands groupes français (1) échappent eux aussi à cette nouvelle loi pour la raison précédemment évoquée. Loi qui veut, entre autres, que les bénéfices des filiales implantées dans des paradis fiscaux ne soient plus reversés aux maisons mères en franchise d’impôts mais désormais taxés à 50 %. Une seule entreprise, l’an dernier, a été épinglée par le ministère du Budget, une filiale de France Télécom installée en République dominicaine.

 

41 pays «  propices au blanchiment d’argent »

Globalement, l’évasion fiscale des multinationales dans les opaques blanchisseries du Luxembourg, du Guatemala ou des Philippines représenterait chaque année 125 milliards d’euros, soit quatre fois le montant estimé nécessaire pour éradiquer la faim dans le monde. Sans compter, bien sûr, le manque à gagner pour certains pays où les plans d’austérité pleuvent sur les peuples. À cette fuite des impôts dans les pays dits riches s’ajoute l’argent du crime organisé et de la corruption qui échappe, lui, en grande partie aux peuples des pays du Sud et dont le montant est estimé par le CCFD-Terre solidaire à quelque 800 milliards d’euros. Des sommes colossales recyclées dans l’un des 41 pays qui, selon le Groupe d’action financière intergouvernemental (Gafi), « restent propices au blanchiment d’argent » ou sur l’un des 54 territoires recensés par le Tax Justice Network (réseau d’ONG et de chercheurs internationaux) qui « cultivent un fort degré d’opacité ». Parmi ceux-ci, sur le Vieux Continent, on trouve Andorre, l’Autriche, Gibraltar, Jersey, le Lichtenstein, le Luxembourg, Monaco, San Marin et la Suisse.

 

Les altermondialistes veulent y croire

Cette problématique des paradis fiscaux et de la corruption qui, à l’instar de la taxe Tobin autrefois, paraît a priori marginalisée, sera-t-elle abordée à Cannes par la présidence française ? Les altermondialistes qui manifesteront à la frontière franco-monégasque veulent le croire, brandissant la loi américaine de juillet 2010 (Dodd Franck Act) qui oblige les entreprises minières et pétrolières cotées en Bourse à déclarer les sommes versées aux gouvernements autorisant leurs activités d’extraction. Pour cette première mise en place du reporting pays par pays (2), il aura fallu dix années de lutte aux États-Unis sur le thème : « Multinationales, publiez ce que vous payez ! »

(1) Peugeot, Carrefour, Saint Gobain, France Télécom, Société générale, Crédit agricole, BNP Paribas, EDF, GDF Suez, Axa, les données sur Total étant «  non disponibles ».

(2) Il s’agit, comme le demandent les altermondialistes, d’obliger les multinationales à publier dans leurs rapports d’activité toute information permettant de savoir si l’impôt payé correspond bien à l’activité 
dans chaque pays où est implantée une filiale.

à Nice à 15 heures contre le g20 Altermondialistes, Indignés, militants associatifs, politiques et syndicaux : ils seront, selon le collectif local contre le G20 de Cannes, plusieurs milliers à manifester ce mardi à partir de 15 heures dans les quartiers populaires de l’est de Nice. Malgré le rétablissement des contrôles à la frontière, on attend nombre d’Italiens qui, avec la population niçoise, sont invités le soir même à un grand concert (Lo Mago dou Casteu, HK et les Saltimbanks…) sur l’esplanade des anciens abattoirs municipaux. Lire : Anti-G20 : ça commence aujourd’hui

Philippe Jérôme

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