Le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a présenté ce vendredi 31 mai les grandes orientations du plan Ambition Bio 2017 visant à donner « un élan supplémentaire » au développement de l’agriculture biologique en France et structurer la filière.
Le plan Ambition Bio 2017 a comme premier objectif de doubler le pourcentage des surfaces agricoles utiles (SAU) bio pour passer de 3,8% fin 2012 à près de 8% d’ici fin 2017. Il vise également d’autres objectifs « opérationnels, quantitatifs et qualitatifs, définis pour l’ensemble des composantes de la filière que sont la production, la transformation et la commercialisation, en lien avec la consommation », a rappelé le ministre Stéphane Le Foll, en présentant vendredi 31 mai les six axes d’actions du plan, définis après des mois de concertations régionale et nationale.
Une dynamique de progression ralentie
Si, selon l’Agence Bio, les consommateurs réguliers et les produits « made in France » ont continué de croître fin 2012, la dynamique de conversions des exploitants connaît toutefois un ralentissement dans l’Hexagone. Alors que la barre du million d’hectares de surfaces certifiées bio (1,03 million d’ha) et des 25.000 producteurs engagés a été dépassée fin 2012, le marché du bio atteint désormais un chiffre d’affaires de 4,1 milliards d’euros fin 2012, se félicite Etienne Gangneron, président de l’Agence Bio et agriculteur bio dans le Cher. Tandis que l’augmentation de la production bio française a également réduit les importations, passées à 25% en 2012.
Mais le bio représente seulement 2,4% du marché alimentaire national pour l’heure, d’après les chiffres de l’Agence. Et un taux de croissance des ventes divisé par deux en moyenne (+5% en 2012 contre +11% en 2011). La part des exploitations bio dans l’ensemble des exploitations agricoles françaises stagne, quant à elle, autour des 4,7%. Les demandes en conversion accusent également une baisse de régime par rapport à 2009 face au tassement des prix entre le bio et le conventionnel. Et ce, en dépit de plus de 1.100 agriculteurs convertis au bio depuis début 2013, rappelle Elisabeth Mercier, directrice de l’Agence Bio.
Un plan en six axes d’actions
Face à ce constat, le plan « Ambition Bio 2017″, partie intégrante du projet agro-écologique pour la France entend donc impulser une nouvelle dynamique pour structurer la filière française.
Côté financements : pour développer la production bio, le gouvernement prévoit une enveloppe de 160 millions d’euros par an entre 2014 et 2020 (contre 90 millions actuellement) dédiée à la conversion et au maintien des exploitations bio via des aides de l’Etat et des crédits européens (mesures agroenvironnementales de la PAC). M. Le Foll a aussi annoncé le maintien du crédit d’impôt bio bénéficiant aux producteurs en conversion.
Le ministère prévoit également de développer l’agriculture biologique sur les « zones de captages à enjeux eau » via un financement des agences de l’eau. Le 10e programme des agences pour la période 2013/2018 prévoyant « un quasi doublement », par rapport au 9e programme, des montants consacrés à la lutte contre les pollutions diffuses d’origine agricole.
Autre axe clé du plan : structurer les filières (collecte, outils de transformation…) avec « deux grandes priorités » données au développement des grandes cultures et des oléo-protéagineux (colza, soja, tournesol, …), visant « l’indépendance protéique pour l’alimentation animale et humaine à l’horizon 2017″.
Pour soutenir des « investissements structurants » de stockage, transformation ou commercialisation, des »projets plus adaptés », le ministère s’engage également à porter à 4 millions par an (soit +1 million d’euros) sa participation au Fonds Avenir Bio, géré par l’Agence Bio. La Banque publique d’investissement (BPI) est également sollicitée pour financer ces investissements structurants par le biais de prêts accordés « à certaines sociétés, dont des coopératives agricoles ».
Le ministre entend aussi développer la contractualisation pour « une bonne adéquation entre l’offre et la demande avec notamment des objectifs d’innovations sociales et environnementales ». Ces contrats « discutés actuellement » dont le travail d’élaboration a été confié à l’Agence Bio et au Synabio (Syndicat des transformateurs et distributeurs bio) visent à « sécuriser les producteurs et l’approvisionnement des transformateurs » et « répondre à la demande », a précisé le ministre.
La contractualisation pourrait constituer un levier de la commande publique pour atteindre l’objectif de 20% de produits bio dans la restauration collective d’Etat, prévu dans le plan « pour développer la consommation et conquérir des marchés ». D’autant que les aliments bio n’ont représenté que 2,4% du total des achats alimentaires dans ces établissements fin 2012.
Développer les circuits courts et de proximité et une « stratégie française à l’export » figurent également dans le plan. Il s’agit aussi de sensibiliser les consommateurs via des campagnes de communication nationales coordonnées par l’Agence Bio et l’information des plus jeunes. Des visites de ferme bio ou des classes du goût seront organisées par les ministères de l’Agriculture et l’Education nationale.
Le programme Ambition Bio 2017 doit contribuer également « au développement du transfert des connaissances et des méthodes de l’agriculture biologique vers les autres modèles de production« , souligne Stéphane Le Foll. La formation des acteurs agricoles et agroalimentaires, et le renforcement de la recherche publique font partie des axes du plan. Le ministère prévoit notamment de renforcer le lien entre l’enseignement agricole et les réseaux professionnels (stages, interventions des professionnels dans les formations, visites de terrain, …) et de développer « la formation continue pour les agriculteurs bio qui n’existe pas », souligne Stéphane Le Foll.
Enfin, le dernier axe du plan vise à veiller « à disposer d’une règlementation propice » au développement de la bio en plein « choc de simplification » des normes.
Mise en oeuvre du plan : vigilance des acteurs
Le programme Ambition Bio 2017 « complet et détaillé sera diffusé d’ici fin juillet 2013″, a précisé le ministère. Si les principaux acteurs du secteur (Agence Bio, Fnab, Synabio, Fnsea) ont salué les annonces du ministre, ils restent néanmoins vigilants quant aux conditions de leur mise en œuvre.
« Le ministre sait que la filière attend des arbitrages budgétaires sur les moyens d’animation du programme pour l’ensemble des réseaux d’accompagnement. Enfin, il est indispensable de mettre en place un pilotage politique et administratif du Programme qui sortirait de la logique « empirique » dénoncée par le rapport des inspections générales sur le précédent plan bio », a prévenu la fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab). De son côté, la fédération des syndicats d’exploitants agricoles (Fnsea) « attend des actes : parler du bio, c’est bien, construire la filière c’est mieux ! Répondre favorablement aux demandes de la société, sans pénaliser les agriculteurs doit être le fil conducteur d’une politique en faveur d’une agriculture biologique efficace et équilibrée ».