Argent public : quand les salariés réclament des comptes
Le Fonds stratégique d’investissement, structure publique destinée à apporter des fonds propres des entreprises, est placé sous surveillance. Un peu comme lors de la “votation” sur la Poste, salariés, contribuables et élus s’associent.
Tout est parti au mois d’avril de la cour de l’usine PTPM à Ay dans la Marne. Au bout de six mois de discussions avec les autorités, le personnel avait réussi un double exploit : convaincre le Fonds de modernisation des équipementiers automobile (FMEA) d’investir 55 millions d’euros d’argent public dans leur groupe et conclure un accord reconnaissant, sous l’égide du préfet, la “viabilité” du site. Patatras ! Dix jours plus tard, Trèves, ainsi recapitalisé, annonçait son plan de plus de 600 suppressions d’emplois en France, avec la fermeture de ses usines “viables” de Ay et de Crépy-en-Valois à la clé… « Notre fric est utilisé n’importe comment, on en a eu marre, rapporte Christine Tuffin, syndicaliste CGT à PTPM. C’était bête, peut-être, mais aujourd’hui, on va arriver à plus de 2.500 plaintes de contribuables déposées au parquet !
Associant salariés, citoyens et élus, cette modalité d’action inédite se déploie sur tout le territoire. A Crépy-en-Valois (Oise), les salariés de Sodimatex et leurs soutiens s’apprêtent à se lancer. “Je porte plainte parce que Trèves a détourné les fonds publics de l’affectation qui leur était assignée par la puissance publique”, confirme le conseiller général communiste Gilles Masure. La pression est telle que même Arnaud Foubert, le maire UMP de Crépy, a explicitement dit, vendredi soir, qu’il allait lui aussi porter plainte contre Trèves. Même mouvement dans les Ardennes où Nexans projette de licencier 53 salariés à Fumay : Sylvain Dalla Rosa et Michèle Leflon, deux conseillers régionaux communistes, promettent une action en justice pour “utilisation frauduleuse de l’argent public”. “Quand on fait les comptes, on voit bien que les restructurations menées avec les fonds du FSI, ce n’est plus un hasard”, s’indignent-ils. “Maintenant, c’est à l’Assemblée nationale que les questions doivent être posées aussi !”, invite encore Caroline Substelny, l’avocate des salariés de Trèves.