Ce matin, 22 octobre 2011 à 11 heures un hommage a été rendu à Guy Môquet par les communistes de Sotteville-lès-Rouen pour le 70ème anniverrsaire de son exécution à Chateaubriant.
En présence de Claude Collin, Conseiller Général du canton et d’une trentaine de personnes dont plusieurs jeunes, Olivier CHRISTOL Conseiller Municipal et secrétaire de la Section PCF de Sotteville a prononcé une allocution pour rendre, au travers de Guy Môquet un hommage aux rersistants de la 2ème guerre mondiale et aussi à la jeunesse d’aujourd’hui qui vit moins bien que les générations précedentes.
La dernière lettre de Guy Môquet à sa famille a été lue par Baptiste Bauza, de la JC.
Après un dépot de gerbe au pied du poteau de la rue Guy Môquet la cérémonie s’est terminée par le chant des partisans et la marseillaise.
Voici le texte de l’intervention :
Mesdames, Messieurs,
Cher(es) ami (es), Cher(es) camarades,
Nous sommes aujourd’hui le 22 octobre 2011.
Il y a 70 ans, le 22 octobre 1941, Guy Môquet était fusillé dans une carrière à proximité de la commune de Chateaubriant en Loire Atlantique.
Il a été assassiné comme otage avec 26 de ses camarades de camps et dans le même temps, 16 otages à Nantes, 5 au Mont Valérien à Paris perdaient la vie pour les mêmes raisons : venger la mort du lieutenant-colonel allemand Hotz.
Une cérémonie en l’honneur des « 27 de Chateaubriant » aura d’ailleurs lieu demain sur place avec la participation de Bernard Thibault et Pierre Laurent, mais aussi d’Odette Niles, l’amie de Guy, qui est aujourd’hui la présidente de l’amicale Châteaubriant-Voves-Rouillé.
L’hommage que nous rendons aujourd’hui à ce jeune de 17 ans et demi, nous le voulons symbolique sur plusieurs aspects :
Hommage aux résistants d’une part et aussi hommage à la jeunesse.
Hommage aux résistants, à ceux qui ont refusé de se coucher devant l’occupant, non parce qu’il était allemand, mais bien parce qu’il était fasciste.
Ces personnes entraient dans la résistance au péril de leur vie. Ils savaient qu’ils pouvaient, pour cela, être torturés, être emprisonnés …
Même si certaines ou certains le nient encore, l’histoire nous enseigne, qu’ils pouvaient aussi être déportés dans des camps de la mort et mourir de maladie, de sévices ou expériences diverses, dans les chambres à gaz. Beaucoup d’ailleurs n’en sont pas revenus…
Le gouvernement français de l’époque avec Pétain et Laval était l’un des soutiens zélé de cette dictature, notamment quand il faisait arrêter les juifs, les homosexuels, les résistants et aussi les communistes, quand il choisissait des otages, y compris des enfants comme Guy, et qu’il les faisait fusiller sans sourciller. Cette exécution est d’autant plus dramatique que Guy qui avait été arrêté sur dénonciation pour avoir été membre d’une organisation clandestine de jeunesse avait été acquitté et sa remise en liberté ordonnée.
Quand on parle de résistante ou résistant, ici à Sotteville, cela évoque un certain nombre de personnes : Colonel Fabien, Paul Langevin, Marcel Lechevalier, Pierre Semard, Célestin Dubois, les frères Cantons (Louis et René), Marius Vallée, Henri Breton, Claudine Guérin et bien d’autres qui ont donné leur nom à des rues de notre commune.
Guy Môquet s’était engagé à la jeunesse communiste suivant les traces de son père, Prosper Môquet, délégué syndical CGT, cheminot, député communiste de Paris en 1939. En disant : « Papa est arrêté, je dois le remplacer ! ».
Dès le 26 septembre 1939, quelques jours après la déclaration de guerre, le gouvernement de Daladier a décidé, par décret, la dissolution du PCF et de nombreuses organisations démocratiques.
Dans la foulée, un deuxième décret autorise les Préfets à suspendre les Maires et les conseillers municipaux. Si ce n’est pas là une atteinte à la démocratie et une remise en cause du suffrage universel ?
Le 16 janvier 1940, la déchéance des députés communistes est adoptée à une courte majorité et ceux-ci sont traduits devant le tribunal militaire au cours d’un procès qui durera du 20 mars au 30 avril 1940.
Un ministre socialiste, Albert Serol, allant même jusqu’à instaurer en avril 1940 la possibilité de peine de mort pour propagande communiste.
Parmi les otages qui seront exécutés à châteaubriant, on retrouve des noms comme Charles Michels, élu député du 15ème arrondissement de Paris en 1936, Jean Pierre Timbaud, secrétaire du syndicat des métallurgistes parisiens, affilié à la CGT, Désiré Granet, secrétaire général de la Fédération CGT des papiers et cartons, Jean Grandel, maire et conseiller général communiste de Gennevilliers, secrétaire de la Fédération postale de la CGT …
Ceux-ci ont été désignés par un émissaire de Pucheu, un ministre français de Pétain. Aussitôt après cette désignation, les forces allemandes, puis la sinistre SS remplacent la gendarmerie française qui gardait le camp.
Tous ces otages sont communistes. Nombre d’entre eux sont des élus, des syndicalistes.
Tout ceci se passe en même temps ou à la suite de la « drôle de guerre » qui a vu une victoire éclaire de l’armée Hitlérienne et la capitulation sans conditions de Pétain.
La montée du fascisme était soutenu de fait par les forces du capitalisme et le « Comité des Forges » de Charles de Wendel, ancêtre de notre Medef, qui avait comme ligne de conduite : « Plutôt Hitler que le Front Populaire ».
Ils voyaient dans cette guerre et dans ses conséquences, les moyens de se sortir de la crise de 1929 et de se débarrasser de cette gauche du Front Populaire qui voulait leur imposer les 40 heures, les congés payés… la base de ce que la droite d’aujourd’hui veut remettre en cause et ce pourquoi Sarkozy a été élu en 2007.
Ce dernier souhaite continuer le travail pour aller vers une société toujours au service des plus riches. Rappelons aussi que la droite, 70 ans après, veut remettre en cause l’ensemble des acquis de 1936, mais aussi tous ceux de la Résistance, du programme du CNR avec la retraite par répartition ou la Sécurité Sociale, de mai 1968 où le Smic avait été augmenté de 30%, de 1981 avec la réduction du temps de travail et la semaine de 39 heures ou de 1997 avec les 35 heures, et la loi sur l’utilisation de l’argent public…
Un maintien de la politique de droite actuelle, qu’elle soit menée par Sarkozy ou autre, serait un véritable retour en arrière pour l’ensemble de la société, un retour aux années les plus noires de notre histoire.
L’autre hommage que je veux rendre, c’est celui à la jeunesse. Jeunesse de la 2ème guerre mondiale, et jeunesse d’aujourd’hui.
Dans la France du 21ème siècle, les jeunes sont maltraités par le gouvernement et par la droite. Suppression de 70 000 postes d’enseignants depuis 2007 avec les conséquences sur les conditions d’apprentissage, les maternelles qui risquent d’être supprimées, des classes à la limite de la surcharge, la mise en concurrence entre les universités, un temps de travail avant la retraite qui s’allonge, une entrée dans la vie active et dans la vie sociale qui se fait de plus en plus tard.
Dans cette France où les progrès technologiques vont bon train, où règne le capitalisme le plus débridé, où les services publics sont démantelés au nom de la rentabilité, les jeunes générations vivent moins bien que les générations précédentes.
De tout temps, les jeunes se sont battus pour la liberté, pour la justice, pour la paix et la dignité.
Ils se sont battus il n’y a pas si longtemps contre le CPE et plus récemment pour la défense des retraites, pour la défense d’un système qui était une idée neuve, une idée de solidarité en 1947 et que la droite veut remettre en cause, ce qui est inadmissible !
Ils se battent aussi contre l’idée qu’il n’y aurait pas d’argent pour financer le « social », les services publics, alors qu’il y en a pour renflouer les banques.
Dans l’Humanité d’hier, Raymond Aubrac rappelle, concernant les jeunes générations d’aujourd’hui, que, du fait de conditions de vie très difficiles, ils pensent qu’ils n’ont pas d’avenir, ils n’ont pas le sentiment que la société les attend. Je leur dit : « Si vous baissez les bras, vous n’avez aucune chance de vous en tirer. » Il y a soixante-dix ans, les jeunes n’ont pas baissé la tête, ils se sont battus et ils ont eu raison.
La dernière lettre de Guy Môquet à ses parents, le 22 octobre 1941 :
»Ma petite maman chérie, mon tout petit frère adoré, mon petit papa aimé, je vais mourir !
Ce que je vous demande, à toi en particulier, petite maman, c’est d’être très courageuse. Je le suis et je veux l’être autant que ceux qui sont passés avant moi. Certes j’aurais voulu vivre. Mais ce que je souhaite de tout mon cœur, c’est que ma mort serve à quelque chose.
Je n’ai pas eu le temps d’embrasser Jean, j’ai embrassé mes deux frères, Rino et Roger. Quant au véritable, je ne peux le faire, hélas ! J’espère que toutes mes affaires te seront renvoyées ; elles pourront servir à Serge qui, je l’escompte, sera fier de les porter un jour. A toi, petit papa, si je t’ai fait ainsi qu’à ma petite maman, bien des peines, je te salue une dernière fois. Sache que j’ai fait de mon mieux pour suivre la voie que tu m’as tracée. Un dernier adieu à tous mes amis, à mon frère que j’aime beaucoup. Qu’il étudie bien pour être plus tard un homme. Dix-sept ans et demi ! Ma vie a été courte ! Je n’ai aucun regret si ce n’est de vous quitter tous. Je vais mourir avec Tintin, Michels. Maman, ce que je te demande, ce que je veux que tu me promettes, c’est d’être courageuse et de surmonter ta peine. Je ne peux en mettre davantage. Je vous quitte tous, toutes, toi maman, Séserge, papa, en vous embrassant de tout mon cœur d’enfant.
Courage !
Votre Guy qui vous aime. »
Guy est mort sous les balles nazies, choisi comme otage par le gouvernement français.
Il est tombé en chantant, comme les autres otages, la marseillaise, le chant du départ, l’internationale ou encore la jeune garde …
Ses camarades de camps ont retrouvé le dernier mot qu’il a écrit : « Vous qui restez, soyez dignes de nous, les vingt-sept qui allons mourir. »
Cette phrase, elle prend toute sa force dans la société d’aujourd’hui.
Même si l’histoire ne se reproduit pas, il peut y avoir des similitudes inquiétantes, la bête immonde est toujours tapie près de nous, prête à bondir…
Sois rassuré Guy, 70 ans après ta mort, et celle de tes amis qui sont tombés en même temps que toi ou plus tard, les communistes du 21 ème siècle sont encore la, pour continuer ton combat et celui de tes amis de la résistance.
Nous, communistes, républicains, progressistes, citoyens ou élus, essayons chaque jour d’être dignes de toi.