Thireau-Morel, le BTP avant, pendant et après la guerre

Fonds Thireau-Morel


LE HAVRE – L’entreprise Thireau-Morel a cessé ses activités en 1974. Pendant des décennies, elle avait été la plus importante entreprise de bâtiment et travaux publics de la région havraise. Lors de la reconstruction, elle a été maître d’œuvre de réalisations importantes comme l’Hôtel de ville, la Chambre de commerce, l’église Saint-Joseph. Une exposition de photographies actuellement visible à la maison du patrimoine montre les travaux en cours d’exécution… Les tirages, contemporains, réalisés en un camaïeu de gris très doux, appartiennent au fonds d’archives de l’entreprise. Avant-guerre, Thireau-Morel avait installé l’escalier mécanique rue de Montmorency (1926-1928) et pendant la guerre, à partir de juin 1942, construit le tunnel Jenner, « pour éviter que son personnel fût enrôlé au STO ». Ces mêmes années, l’entreprise construisit une bonne part des 400 ouvrages et blockhaus qui localement composent l’imposante forteresse « Festung », partie prenante du mur de l’Atlantique.
Dans l’immédiat après-guerre, l’entreprise fut mise en cause par le Comité local de libération puis par le Comité de confiscation des profits illicites (CCPI). Dans le dossier du CCPI, un inspecteur des impôts rapporte : « C’est l’entreprise qui a le plus travaillé pour les Allemands. Elle a toujours agi en traitant directement avec eux ». Ailleurs, on lit : « La société Thireau-Morel s’est enrichie de façon très sensible; l’état de guerre et la clientèle ennemie ont seuls contribué à l’essor de l’entreprise ». D’autres pièces soulignent que les directeurs, tous actionnaires, ont bénéficié d’une augmentation anormale des salaires.
Pour un chiffre d’affaires fait avec les Allemands de 97,7 millions de francs l’entreprise se verra frappée d’une confiscation de 8 millions de francs (soit 8%). Une sanction assez clémente, comme la plupart de celles qui furent prononcées contre les entreprises du secteur. Les sinistrés étaient dans l’urgence de retrouver un toit, le savoir-faire de ces entreprises comptait plus que l’origine de leur prospérité. Comme l’écrit Julie Chassin, historienne : « L’épuration du BTP n’a pas eu lieu ou si peu ».
Bibliographie
• « L’épuration économique en France à la Libération » aux Presses universitaires de Rennes sous la direction de Marc Bergère. Articles de Claude Malon et Julie Chassin.
• « Les patrons sous l’Occupation » Jean-Claude Hazéra et Renaud de Rochebrune chez Odile Jacob
Exposition photographique
Le fonds Thireau-Morel jusqu’au 29 janvier 2012 à la Maison du patrimoine-Atelier Perret, 181, rue de Paris. Du lundi au samedi de 10  à 18 h, le dimanche de 11 à 17 h. Tél. : 02 35 22 31 22.

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