Affichage publicitaire : le Conseil d’État suspend partiellement le décret

 

Le Conseil d’État vient de suspendre partiellement l’exécution du décret sur l’affichage publicitaire publié fin janvier. La raison ? Un doute sérieux quant à la légalité de la disposition relative aux dimensions des enseignes scellées au sol.

Par une ordonnance en date du 8 juin 2012, le Conseil d’État a suspendu l’exécution des dispositions de l’article R. 581-65 du code de l’environnement issues du décret sur l’affichage publicitaire. Une erreur de renvoi dans cet article aurait permis à compter du 1er juillet l’implantation des grandes enseignes sur pied sans limitation.

Coquille technique « gravissime »

La publication du décret sur l’affichage publicitaire fin janvier avait provoqué l’ire des associations de protection de l’environnement, qui avaient dénoncé avec vigueur un véritable « assassinat » du Grenelle.

« Élaboré tout à la fois dans la précipitation et l’absence de concertation, le décret du 30 janvier 2012 sur l’affichage publicitaire prévoyait notamment la suppression de toutes les règles de surface et de hauteur applicables aux grandes enseignes sur pieds« , souligne France Nature Environnement (FNE).

L’association Paysages de France confirme l’existence de cette coquille technique « gravissime »: faute de correction avant l’entrée en vigueur du décret prévue le 1er juillet prochain, « les enseignes scellées au sol n’auraient plus été limitées, ni en surface, ni en hauteur et, du fait de l’amendement scélérat d’Eric Straumann, pour six ans au moins, ce qui aurait pu conduire à terme à une situation ingérable« . L’association avait annoncé le 2 avril avoir formé un recours devant le Conseil d’État.

« Alerté du problème dès le mois de mars, le ministère de l’Écologie n’avait pris aucune mesure pour corriger cette erreur« , indique FNE. La fédération et l’association Agir pour les paysages avaient donc décidé de saisir le Conseil d’État d’un recours en référé-suspension et d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), en plus du recours en annulation qu’elles avaient déjà déposé le 23 mars 2012.

Urgence et doute sérieux quant à la légalité

La Haute juridiction administrative vient de donner raison aux requérantes en suspendant l’application des dispositions du décret relatives aux enseignes scellées au sol jusqu’au jugement de l’affaire au fond ou, si elle est antérieure, jusqu’à la date de publication d’un décret modificatif.

En effet, bien que le ministre ait fait valoir qu’il ne s’agissait pas de l’intention du Gouvernement, le Conseil d’État confirme que « les enseignes scellées au sol ou installées directement sur le sol ne seront plus soumises à aucune restriction quant à leurs surface et hauteur maximales à compter du 1er juillet 2012« . Et si un projet de décret est en préparation pour réparer cette « coquille », « aucune précision n’a pu être apportée quant à l’intervention de ce texte avant le 1er juillet prochain« . La condition d’urgence exigée pour ordonner la suspension d’une décision administrative était donc remplie.

D’autre part, les requérantes avaient fait valoir qu’ »en ne restreignant plus, à compter du 1er juillet 2012, les dimensions maximales des enseignes de plus d’un mètre carré scellées au sol ou installées directement dans le sol« , les dispositions de l’article R. 581-65 du code de l’environnement méconnaissaient l’obligation faite au Gouvernement de déterminer « les conditions de la prévention des atteintes portées par ces enseignes aux paysages et au cadre de vie« . Pour le Conseil d’État, ce moyen devait être regardé, en l’état de l’instruction, comme « étant propre à créer un doute sérieux quant à la légalité » des dispositions contestées.

Les deux conditions posées par l’article L. 521-1 du code de justice administrative pour que le juge des référés puisse prononcer la suspension d’un acte administratif étaient donc remplies.

En revanche, considérant que la condition d’urgence n’était pas satisfaite en ce qui concerne les conclusions relatives à la réglementation des bâches publicitaires, le Conseil d’État estime qu’il n’avait pas à statuer, dans le cadre de cette instance en référé, sur la demande de renvoi au Conseil constitutionnel de la QPC relative à la conformité de l’article L. 581-9 du code de l’environnement à la Charte de l’environnement.

Eviter un désastre pour les paysages

Cette décision aura permis, en tout état de cause, « d’éviter un désastre pour les paysages et le cadre de vie« , selon FNE.

De son côté, Paysages de France indique attendre du Gouvernement « que soient réparés au plus vite les dégâts causés, au cours des 20 derniers mois notamment, par le travail de sape conduit par les afficheurs avec la complicité active du gouvernement sortant« .

C’est pourquoi, l’association a d’ores et déjà communiqué à la ministre de l’Écologie les points « qui nécessitaient et permettaient une correction rapide, dans le cadre de la modification du « décret affichage » et dans le cadre d’un décret ramenant dès à présent à deux ans le délai de mise en conformité des publicités et des pré-enseignes avec les nouvelles réglementations« .

Laurent Radisson

  |  Actu-Environnement.com

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