Que contient vraiment le nuage de pollution à Pékin ?

CHINA-ENVIRONMENT-POLLUTIONL’Airpocalypse se poursuit en Chine : depuis une semaine, le nord du pays suffoque de nouveau sous une épaisse pollution atmosphérique. A tel point que les plus importants distributeurs de masques respiratoires filtrants étaient en rupture de stock mercredi 26 février.

La densité de particules PM 2,5 (de 2,5 micromètres de diamètre, les plus dangereuses) a atteint mercredi matin à Pékin, en alerte, un seuil de 557 microgrammes par mètre cube, selon l’ambassade américaine. Dans la province environnante du Hebei, connue pour ses industries lourdes très polluantes, la ville de Xinji a, elle, enregistré 761 microgrammes. Pour rappel, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande un plafond maximum de 25 μg/m3, tandis que les autorités chinoises elles-mêmes estiment qu’au-dessus de 300, il est « dangereux » de rester dehors.

Les conséquences pour la santé se font d’ores et déjà sentir : la pollution de l’air extérieur a provoqué 1,2 million de morts prématurées en Chine en 2010, soit presque 40 % du total mondial des morts prématurées dues à la pollution, selon une vaste étude sur la « charge mondiale des maladies » publiée en décembre 2012 dans l’hebdomadaire médical britannique The Lancet. Mais au fait, qu’y a-t-il exactement dans l’air chinois pollué ?

Des particules fines. Si elles sont présentes naturellement dans l’environnement, ces particules en suspension dans l’air voient leur concentration considérablement augmenter sous l’effet des activités humaines, essentiellement l’industrie, la combustion du charbon et la circulation automobile – les trois principales sources de pollution en Chine. Deux catégories de particules sont particulièrement encadrées par les normes de qualité de l’air : les PM10 (« particulate matter » en anglais), de diamètre inférieur à 10 micromètres et les PM2,5, qui mesurent 2,5 microns et peuvent donc facilement pénétrer dans les voies respiratoires. La liste des maux qu’elles provoquent est longue : bronchite chronique, asthme, cancer du poumon, accident vasculaire cérébral, infarctus du myocarde ou encore problèmes placentaires.

Fin janvier, une équipe de chercheurs s’est penchée sur la composition de ces PM10 et PM2,5, lors d’un épisode de pollution particulièrement fort à Pékin. Résultat : ils ont recensé 1300 espèces microbiennes différentes, comme le relate l’étude publiée dans Environmental Science and Technology. Si, de manière quelque peu rassurante, la plupart de ces micro-organismes sont bénins (comme les Geodermatophilus obscurus, une bactérie commune du sol), quelques-uns sont toutefois responsables d’allergies et de maladies respiratoires chez les hommes. Les scientifiques ont ainsi trouvé des pneumocoques – bactéries qui se logent dans les voies respiratoires et peuvent provoquer des infections graves comme des méningites ou pneumonies – des Aspergillus fumigatus – champignons responsables d’infections sévères – et une série d’autres bactéries que l’on trouve généralement dans les matières fécales.

Du monoxyde de carbone. Difficilement décelable dans la mesure où c’est un gaz incolore, inodore et sans saveur, il est produit par la combustion incomplète de matières organiques (gaz, charbon, fioul, carburants, bois). Principales sources de monoxyde de carbone (CO) : le trafic automobile, les centrales à charbon et le mauvais fonctionnement des appareils de chauffage domestiques. Le CO est principalement un poison sanguin. Il se fixe à la place de l’oxygène sur l’hémoglobine du sang conduisant à un manque d’oxygénation du système nerveux, du cœur et des vaisseaux sanguins. Conséquences : maux de tête, nausées, vomissements, vertiges, jusqu’à la mort en cas d’intoxication grave.

Du dioxyde de soufre. Ce gaz incolore, dense et toxique provient principalement de la combustion de certains charbons, pétroles ou fiouls, au cours de laquelle les impuretés soufrées contenues dans les combustibles sont oxydées par le dioxygène de l’air (O2), pour donner du dioxyde de soufre (SO2). En raison de sa combustion massive de charbon et de ses industries polluantes, la Chine est l’un des principaux émetteurs de SO2 dans le monde – même si elle a entrepris de réduire ses émissions. Son inhalation est fortement irritante : elle peut entraîner une obstruction des bronches, une diminution du débit respiratoire, ainsi que des irritations et des inflammations, en particulier gastriques. Une intoxication grave au SO2 peut entraîner des décès par cause cardio-vasculaire.

Des oxydes d’azote. Les oxydes d’azote (NOx), notamment le monoxyde d’azote (NO) et le dioxyde d’azote (NO2), se forment lors des combustions à haute température. Près de Pékin, ils sont massivement émis par les voitures, les centrales à charbon, les installations de chauffage ou encore les industries lourdes. Ils peuvent altérer la respiration et provoquer des bronchites, particulièrement chez les asthmatiques et les enfants. Ils participent également aux phénomènes des pluies acides, de même que le dioxyde de soufre.

De l’ozone. L’ozone (O3) constitue le principal polluant du « smog » qui enveloppe Pékin. Présent naturellement dans la stratosphère (la couche d’ozone intercepte les rayons ultraviolets du Soleil), il s’avère dangereux en excès dans les basses couches de l’atmosphère (la troposphère). C’est alors un polluant dit « secondaire » dans la mesure où il n’est pas rejeté directement dans l’air mais se forme par réaction chimique entre des gaz « primaires » d’origine automobile et industrielle (NOx, CO et composés organiques volatils COV), sous l’effet des rayonnements solaires. Capable de pénétrer profondément dans les poumons, il provoque à forte concentration des inflammations des bronches, gênes respiratoires et irritations oculaires.

Et pour tout comprendre sur les causes et conséquences de cette très grave pollution atmosphérique, voici une vidéo réalisée avec le pôle vidéo du Monde.fr.

Audrey Garric

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