Ni taxe ni impôt, Ségolène Royal prône une écologie « positive »



Ni taxe ni impôt, Ségolène Royal prône une écologie « positive »

LE MONDE | 05.04.2014 à 13h02 • Mis à jour le 05.04.2014 à 13h12 |Par Sophie Landrin

Sa nomination avait été saluée par les associations de défense de l'environnement, rassurées par son expérience, son poids politique et son envergure médiatique. Tous les acteurs concernés sont désireux de stabilité : en deux ans, l'écologie a connu trois ministres et peu de résultats.

Mais la première sortie de Ségolène Royal, jeudi 3 avril, sur ses terres poitevines a tempéré les enthousiasmes. Devant quelques journalistes, la nouvelle ministre de l'écologie a annoncé vouloir « remettre à plat l'écotaxe » poids lourds, qui avait soulevé, à l'automne 2013, la colère des Bretons et contraint le premier ministre à suspendre le dispositif sine die.

« Une bien mauvaise entrée en matière » selon les ONG. Une initiative« totalement absurde » pour Europe Ecologie-Les Verts. S'étonnant de la polémique, Ségolène Royal s'est défendue, sur son compte Twitter, d'avoir enterré le dossier, précisant que la « remise à plat » signifiait qu'elle souhaitait donner « du temps à l'écoute ».

« CHANGER LES COMPORTEMENTS AVANT DE TAXER »

Le refus d'une « écologie punitive » qui se traduirait par des hausses d'impôts est une constante chez Ségolène Royal. Lors de la primaire socialiste en 2011, la candidate prônait déjà la révision de l'écotaxe poids lourds, en envisageant des « aides à la conversion, ou l'exonération de certaines PME en contrepartie d'efforts sur l'emploi et l'environnement, et par le renforcement du ferroutage ou du fluvial ».

Elle s'opposait à l'instauration de péages urbains aux abords des grandes villes, pour diminuer la pollution de l'air. Toujours en 2011, elle rejetait le principe de la « contribution climat-énergie » – créée en 2013 par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault –, pour ne pas pénaliser les ménages modestes et moyens.

Dans sa région Poitou-Charentes, qu'elle présente comme un laboratoire, elle assure avoir changé les comportements, par une politique de subventions aux entreprises et aux particuliers, sans augmentations d'impôts. « L'impôt supplémentaire pour régler un problème, c'est le degré zéro de la politique. Il faut avoir des convictions, expliquer et surtout mettre en place les alternatives pour permettre aux personnes de changer leurs comportements avant de les taxer », expliquait-elle au Monde en septembre 2013.

Mais sur le plan national, la ministre aura du mal à promouvoir un modèle économique plus respectueux de l'environnement par de simples incitations. L'Etat n'en a plus les moyens financiers. Le principe de l'écotaxe avait été l'une des mesures phares décidées en 2007 par le Grenelle de l'environnement. Les associations rappellent qu'il ne s'agit pas d'un impôt mais d'un péage visant les poids lourds de plus de 3,5 tonnes, les plus polluants, en application du principe pollueur-payeur.

La fondation Hulot souligne que si elle n'est pas mise en place, c'est l'ensemble des contribuables qui paieront l'entretien des routes. L'Etat serait privé d'une redevance destinée à financer une partie des infrastructures de transports durables.

Lors de son bref passage au ministère de l'environnement dans le gouvernement Bérégovoy entre mars 1992 et avril 1993, Ségolène Royal avait bien imposé une taxe sur les déchets pour améliorer le recyclage et la valorisation. Mais le texte de loi avait été préparé par son prédécesseur Brice Lalonde.

POSITIONS AUDACIEUSES

A l'époque, la conscience écologique dans l'opinion était encore balbutiante, les enjeux forts différents. Le premier rapport (1990) du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat venait tout juste de paraître, et le réchauffement climatique était encore mal perçu. Mme Royal s'affichait alors comme « la ministre des paysages ». Sa priorité consistait à protéger le patrimoine naturel de la France, rongé par l'urbanisation, les démembrements et l'industrialisation.

Si la nouvelle ministre bénéficie d'un préjugé favorable auprès des associations de défense de l'environnement, c'est que la candidate à la présidentielle en 2007 a soutenu des positions audacieuses, notamment sur la question de la transition énergétique.

Lire également : La revanche de Ségolène Royal

En 2011, Greenpeace, qui avait questionné l'ensemble des prétendants socialistes, lui avait décerné la meilleure note. Sortie du nucléaire à échéance de 40 ans au maximum, réduction de l'atome à 50 % de la production d'électricité dans les 20 ans, abandon du projet de stockage des déchets nucléaires sur le site de Bure (Meuse), arrêt des réacteurs EPR, interdiction de l'exploitation du gaz de schiste, tous ces dossiers figurent désormais sur son bureau de l'Hôtel de Roquemaure.

Tout en haut de la pile, il y a aussi l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, ce projet si cher à l'ancien premier ministre, mais honni par les défenseurs de l'environnement. En 2011, la candidate à la primaire socialiste avait demandé « une nouvelle enquête publique pour sortir de l'impasse » et s'interrogeait sur la possibilité de trouver « un site moins nuisible et moins fragile ». Sur ce dossier, les écologistes espèrent une « remise à plat ».

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