Investir : mon intervention au Conseil régional le 15 décembre 2014

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Séance plénière du Conseil Régional – 15 décembre 2014

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« Investir »

Intervention de Nicolas MAYER-ROSSIGNOL

Président de la Région Haute-Normandie

Mesdames, Messieurs, Cher(e)s collègues,

Je souhaite tout d’abord en votre nom à tous la bienvenue à notre nouvelle collègue, Sylvie LANGEARD. C’est une charge passionnante au service des Haut-Normands qui vous attend, vous pourrez compter sur mon écoute.

Je salue également les élèves et les personnels du Lycée Jean-Baptiste Decrétot à Louviers, qui prépareront et nous serviront le déjeuner aujourd’hui.

Avant d’entamer nos travaux, j’ai souhaité donner la parole aux représentants des salariés qui manifestent ce matin –je salue leur sens des responsabilités-, notamment ceux du site UPM Chapelle Darblay à Grand-Couronne dont le groupe a annoncé récemment la fermeture d’une ligne de production qui entrainerait la suppression de 196 postes. J’ai également reçu personnellement, il y a quelques jours, des représentants syndicaux du Grand Port Maritime de Rouen à propos des investissements portuaires et en particulier du renouvellement du dock flottant que la Région, à condition que les autres partenaires s’engagent, est prête à accompagner.

Le site UPM de Grand-Couronne dispose de salariés aux savoir-faire reconnus, d’un appareil productif de grande qualité, d’un positionnement géographique stratégique. Le secteur papetier emploie dans notre région près de 10000 salariés. Une approche globale doit prévaloir pour le préserver et le développer. Car au-delà même du site de Grand-Couronne, c’est l’avenir de la filière de recyclage et de l’industrie papetière dans la vallée de la Seine (et même en Europe puisque d’autres sites sont touchés), qui est aujourd’hui en question.

Dès le 21 novembre dernier, nous avons avec Guillaume Bachelay, Député de la 4ème circonscription de Seine-Maritime, et Didier Marie, Sénateur de Seine-Maritime, alerté le Premier Ministre sur cette situation. Nous avons demandé à l’Etat trois éléments précis :

  • qu’un dialogue social constructif soit rapidement engagé entre les services préfectoraux, les syndicats et la Direction ; cela est mené par le Préfet, et les élus que nous sommes y sont très attentifs.
  • qu’un travail soit mené concernant la reconfiguration de l’outil industriel. Plusieurs pistes se dégagent à ce stade : un centre de tri et d’affinage multimatériaux ; une unité de pâte à papier pour alimenter d’autres sites industriels régionaux, je pense en particulier à Double A à Alizay, dans une logique d’économie circulaire. Des échanges sont en cours pour évaluer la faisabilité de ces projets.
  • enfin, nous avons demandé que le Gouvernement s’engage sur le développement national de la filière papetière, en s’appuyant notamment sur le rapport du 8 juillet dernier réalisé par le député Serge BARDY.

J’ai dans les mains la réponse écrite du Premier ministre à nos sollicitations, que j’ai reçue vendredi 12 décembre dernier. Le Premier ministre, qui nous donne son accord pour approfondir ces questions auprès du Comité stratégique de la filière Bois, donne consigne au Ministre de l’Economie et de l’Industrie de travailler avec nous pour lui faire des propositions.

L’avenir de la filière doit s’inscrire dans la réflexion actuelle concernant le développement de l’économie circulaire. Des lieux-sources –la Défense, le bassin francilien- jusqu’aux lieux de recyclage, de production et de distribution (UPM, Double A, Europac), il y a là une réelle opportunité de croissance et d’emplois. Je rappelle que la Région a récemment organisé les premières assises régionales de l’économie circulaire dans ce même hémicycle. J’écrirai dès aujourd’hui au Ministre pour lui demander de saisir, conformément aux directives du Premier ministre, les responsables du Comité national stratégique de la filière Bois et d’organiser rapidement une table ronde rassemblant l’ensemble des acteurs. Conformément aux conclusions du rapport BARDY, je lui demanderai également la nomination d’un chargé de mission national pour élaborer, avec les acteurs locaux et en particulier les représentants des salariés et les élus locaux, un contrat stratégique de filière « cellulose ». Concernant la reconfiguration de l’outil industriel et en particulier de la machine 3, la Région sera au rendez-vous, comme elle l’a toujours été par le passé, pour faciliter y compris financièrement les études nécessaires -à travers, par exemple, le Comité d’entreprise- et contribuer ainsi à préserver les emplois sur notre territoire.

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Chers collègues, les questions de l’emploi, du développement, de l’investissement, sont au cœur de nos préoccupations. Avec l’examen de notre budget et de nos contributions aux futurs grands investissements pour notre Région, cette séance revêt une importance toute particulière. Particulière à plusieurs titres puisqu’il s’agit du dernier exercice budgétaire de la mandature, et très probablement du dernier pour notre collectivité dans sa configuration institutionnelle actuelle.

Composer un budget est toujours un exercice complexe. Il l’est plus encore aujourd’hui dans le contexte que nous connaissons tous. Je tiens à remercier l’ensemble des agents de la Région, qui ont redoublé d’effort pour le constituer. Chers collègues, la tentation est grande, pour tous les groupes politiques y compris celui dont je suis issu, de préférer le réflexe à la réflexion et d’adopter des discours de posture, plaqués, calqués. J’invite chacun, dans la majorité comme dans l’opposition républicaine, à constater l’effet, au fil des élections, de ce prêt-à-penser sur l’abstention et le vote extrême. Je nous invite, collectivement, à éviter le copié-collé qui ne convainc plus personne. Je nous invite, simplement, à être à la hauteur de cette séance.

Alors que les dotations de l’Etat sont en diminution, et en diminution significative, je vous présente aujourd’hui un budget en augmentation. Je vous présente un budget avec une dette en baisse, avec des dépenses de structure maîtrisées. Je vous présente un budget sans augmentation d’impôts. Je vous présente un budget dans lequel les politiques de soutien aux PME, à l’innovation, à l’agriculture et à la pêche, à la culture et au tourisme, seront renforcées. Je vous présente un budget avec un niveau d’investissement jamais égalé ces dernières années.

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Il y a un an, j’annonçais que 2014 serait une année charnière et une année d’action. Elle le fut : préparation des prochaines contractualisations (Contrat de Plan Etat-Région, Contrat de Plan Interrégional de la Vallée de la Seine, contrats avec les Pays et les Agglomérations, nouveau contrat 276), gestion des fonds européens, mise en place de nouvelles politiques régionales (Pass Région Mobilité Emploi, Pass Santé, aides aux entreprises, dispositifs en faveur de l’électromobilité, caution locative étudiante, développement d’une filière numérique), concrétisation des projets stratégiques (attribution du parc éolien offshore au Tréport). Notre feuille de route était chargée, elle a été respectée avec le concours des élus et d’une administration dont la compétence est légitimement reconnue.

Au plan financier, comme le Rapport de la Cour des Comptes que nous examinerons aujourd’hui en atteste, la Haute-Normandie reste une fois de plus dans le peloton de tête des Régions les mieux gérées de France. Une dette en diminution (222 millions d’euros au 1er janvier 2015 contre 238 millions d’euros un an auparavant) ; une capacité de désendettement inférieure à un an, des dépenses d’intervention qui représentent près de 90% des dépenses réelles, une masse salariale maîtrisée tout en résorbant la précarité et en augmentant le taux d’emploi pour les personnes handicapées. Cette année encore, nous faisons le choix de ne pas augmenter la fiscalité régionale : celle sur les permis de conduire restera à zéro euro ; celle sur les cartes grises n’augmentera pas et demeurera parmi les plus basses de France (35€ par cheval fiscal pour une moyenne nationale de 40€).

C’est notre gestion sérieuse de l’argent public qui nous permet d’investir au service des Haut-Normands et des territoires. Notre collectivité est, de loin, le premier investisseur public local de toute la Normandie. C’est parce qu’elle s’appuie sur des finances saines que notre collectivité sera en capacité d’apporter en 2015 un niveau d’investissement élevé, avec 393,4 millions d’euros d’Autorisations de Programme nouvelles, en hausse de 6% par rapport au budget primitif 2014 qui était lui-même en hausse de 10% par rapport à 2013.

La Normandie a besoin d’investissement ; c’est la clé de son développement. Depuis plus d’un an je me battais, avec de nombreux élus locaux et représentants de la société civile, pour que la Vallée de la Seine bénéficie d’une ambition nationale matérialisée par des engagements concrets de l’Etat ; pour que les investissements essentiels au développement de la Normandie – dans les grandes infrastructures, l’environnement, le développement économique, la culture, le tourisme – reçoivent un appui financier national, en plus de celui des collectivités. De nombreux rapports, plus ou moins utiles, ont été rédigés sur la Vallée de Seine ces dernières années. Avec la Région Basse-Normandie – préfigurant en cela la fusion annoncée de nos territoires – et l’Ile de France, avec les Départements de l’Eure et de la Seine-Maritime, avec la Métropole Rouen Normandie, l’Agglomération havraise, avec les territoires rassemblés, les acteurs du monde économique, les CESER, nous demandions depuis un an de passer des paroles aux actes, de la théorie aux « travaux pratiques ».

Cette bataille de l’investissement, nous sommes en train de la gagner. Le 8 novembre 2013, il y a près d’un an, j’invitais dans cet hémicycle de nombreux acteurs Normands et Franciliens à signer un courrier au Premier ministre lui demandant de s’engager avec nous sur ce que j’appelais un Contrat de Plan Interrégional pour la vallée de la Seine (un CPIER), venant en supplément – et non en substitution – des Contrats de Plan Régionaux. Ce courrier, vous l’avez devant vous. Beaucoup pensaient que notre démarche serait vaine. Aujourd’hui, ce CPIER devient réalité. Comme nous l’écrivions, nous avons obtenu du Gouvernement « qu’au projet d’intérêt national – le développement de la Vallée de la Seine – corresponde une ambition nationale, portée par des moyens budgétaires supplémentaires et spécifiques de l’Etat ».

Grâce à nos efforts, la vallée de la Seine va recevoir un appui national sans précédent. Ce Contrat est le tout premier et le plus élevé en France à ce niveau d’engagements. Il récompense le travail collectif que nous avons porté. Plus de 310 millions d’euros d’engagements supplémentaires de l’Etat y sont inscrits pour la période 2015-2020. En y ajoutant les contributions des Régions et des maîtres d’ouvrage, cela revient à près d’un milliard d’Euros supplémentaires pour la Vallée de Seine. La Ligne Nouvelle Paris Normandie, projet emblématique et très attendu par nos concitoyens, mais aussi Serqueux-Gisors, les grandes opérations d’aménagement portuaire au Havre ou à Rouen, le terminal fluvial d’Alizay, la gestion des berges de Seine, le développement touristique et culturel, constituent l’ossature principale de ce Contrat. Notre démarche a précédé la réforme territoriale, elle la rejoint aujourd’hui. Ce CPIER, c’est le premier Contrat de Plan Normand.

Quant au Contrat de Plan Etat-Région Haut-Normand (le CPER), s’il n’est pas parfait (notamment en matière d’enseignement supérieur et de recherche), il permettra lui aussi un réel effet levier au profit du développement régional, à une hauteur similaire, quoique légèrement inférieure, au Contrat de la période précédente. L’Etat s’engage à mobiliser des crédits à hauteur de 360 millions d’euros, pour un engagement global (en incluant la Région et les maîtres d’ouvrage) de l’ordre de 1 milliard d’Euros là encore. La Région sera au rendez-vous.

Autre exemple récemment, avec l’annonce par la Ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Marisol Touraine, du soutien de l’Etat à hauteur de 22 M€ au CHU-Hôpitaux de Rouen pour la réalisation de son projet d’investissement.

Je vous propose également de nous engager dans une nouvelle démarche de rassemblement avec les Départements de l’Eure et de la Seine-Maritime, le ‘276’, unique en France depuis 2007. Le 276 a fait ses preuves. Là encore, nos investissements conjoints permettront de dégager près de 900 millions d’Euros au service des territoires normands, en matière de tourisme, d’écomobilité, d’amélioration des infrastructures, de préservation de la biodiversité, de santé –notamment dans les territoires ruraux- ou encore de soutien à la vie associative. Je salue à cet égard le travail exemplaire qu’ont mené Jean Louis DESTANS et Nicolas ROULY, avec un grand sens de l’intérêt général, pour aboutir à la proposition qui vous est soumise aujourd’hui.

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Chers collègues, 2015 marque une nouvelle étape, et pas des moindre : celle de la préparation de la fusion de la Haute et de la Basse-Normandie. Dans un peu plus d’un an, le 1er janvier 2016, Haute et Basse-Normandie ne feront plus qu’une. C’est un changement majeur pour notre territoire, en même temps qu’une grande opportunité. On peut débattre des heures des responsabilités des uns et des autres sur ce sujet. La Gauche y a-t-elle toujours été favorable ? Certains oui, d’autres non, les positions des uns et des autres, toutes respectables, étaient connues. La Droite a-t-elle pour autant agi lorsqu’elle avait tous les leviers pendant plus de dix ans, y compris lorsque les deux Régions étaient gérées par elle ? Non. Elle n’a rien fait. L’Histoire ne retiendra que les votes, que les faits : c’est ce Gouvernement, c’est cette majorité, avec l’appui de certaines personnalités de l’opposition, qui ne siègent pas dans cet hémicycle mais dont je salue le sens de l’intérêt général dont ils ont fait preuve, qui aura fait la Normandie.

Avec mon homologue bas-normand, nous sommes mobilisés pour faire de cette réforme une réussite. Avant même que la loi ne soit votée, les deux Régions ont entamé ensemble les premiers travaux techniques préparatoires à la fusion, de façon à mutualiser leurs besoins. L’objectif est simple : anticiper, pour pouvoir gérer sereinement les grands chantiers qui nous attendent. Je salue les services régionaux qui se sont engagés avec beaucoup de professionnalisme dans cette voie.

Nous avons conjointement saisi les Conseils Economiques Sociaux et Environnementaux Régionaux de nos territoires respectifs pour leur demander de faire ensemble le bilan des coopérations interrégionales existantes (il y en a beaucoup) et des politiques communes qui pourraient faire l’objet d’un rapprochement rapide et efficient en termes d’utilisation de l’argent public. Je remercie par avance le Président Gérard LISSOT, toujours présent lors de nos séances plénières, ainsi que les membres des CESER qui rendront leurs travaux fin janvier.

La Normandie doit se faire pour les Normands et par les Normands. C’est pourquoi, comme je m’y étais engagé, j’ai multiplié dès juin les rencontres avec nos concitoyens à l’occasion de réunions publiques, afin d’échanger sur la réforme territoriale et la fusion des Régions. La même démarche a été engagée, depuis septembre, par mon homologue en Basse-Normandie. Ces réunions rencontrent un réel succès et montrent l’intérêt des Normands pour leur future Région. J’invite d’ailleurs tous les élus régionaux à s’y rendre. Cette concertation doit être la plus large possible. C’est la raison pour laquelle nous avons aussi lancé un site internet mutualisé à l’échelle normande (www.normandie2016.fr), où chacun peut s’informer et contribuer au débat.

La force de la Normandie, ce sont ses territoires ! De Cherbourg à Gournay-en-Bray, d’Alençon à Eu, du Havre à Livarot, d’Evreux à Avranches… Ce qui est vraiment capital (sans jeu de mot…), c’est que chaque territoire soit respecté, accompagné, soutenu, trouve sa force et sa place. Une nouvelle phase s’ouvrira à partir de janvier où les élus régionaux, mais aussi les membres du CESER, seront bien évidemment associés. Je poursuivrai également les réunions publiques, partout sur notre territoire, pour continuer d’échanger avec nos concitoyens sur le projet normand dont les arêtes émergent déjà : l’excellence normande autour du développement économique, industriel et agroalimentaire, de notre façade maritime, des énergies marines renouvelables. Le rayonnement normand autour de la culture, du patrimoine, du tourisme. Les solidarités normandes, en particulier les solidarités territoriales, autour des grandes infrastructures : trains, routes, fluvial, portuaire, numérique. Dans la grande Normandie, 1+1 doit faire plus que deux. Comme je l’ai dit lors de notre dernière séance plénière je me battrai pour que tous les territoires soient respectés et valorisés.

2015 verra aussi, je le souhaite, la conclusion de la réforme territoriale autour, non pas des périmètres, mais des compétences des collectivités. C’est un enjeu stratégique. Le Parlement entame cette semaine la discussion du projet de loi portant Nouvelle Organisation Territoriale de la République. Je souhaite que ce débat, difficile, permette de simplifier l’action publique (ce qui ne veut pas dire réduire), pour plus de lisibilité et plus d’efficacité. Les Régions doivent être confortées dans leur rôle de collectivité ‘stratège’, notamment en matière de développement économique, de tourisme (à ce sujet, comme je m’y étais engagé lors de notre dernière séance plénière, un plan d’actions concret vous est proposé aujourd’hui), en matière de formation, d’aménagement du territoire, de grandes infrastructures.

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Mes chers collègues, aujourd’hui je vous invite à délibérer sur plusieurs milliards d’Euros :

  • près d’un milliard pour la Vallée de la Seine, à travers le CPIER ;
  • près d’un milliard pour la Haute-Normandie, à travers le CPER ;
  • près d’un milliard pour nos territoires, à travers le contrat 276 ;
  • près d’un milliard pour notre budget 2015.

Nous ne pourrions le faire sans notre bonne gestion. Depuis un an, j’ai fixé un cap : le développement de notre Eco-Région. Avec une seule boussole : l’emploi. Avec une seule méthode : dire ce que l’on fait, faire ce que l’on dit. Par delà les divergences politiques qui sont parfaitement légitimes dans notre démocratie, je souhaite que nos débats aujourd’hui soient dignes de cette séance, à plusieurs égards historique. Soyons, ensemble, à la hauteur des enjeux.

Je vous remercie.

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