statuts des syndicats ou brûlots antirépublicains ?
La fédération SUD PTT affirme « inscrire son action dans une double continuité, celle définie en 1906 par la CGT dans la charte d’Amiens (…) et celle du projet de socialisme autogestionnaire porté par la CFDT dans les années 1970 ». FO se prononce, elle, « pour la disparition du salariat et du patronat ». La CFDT « combat toutes les formes de capitalisme ». Et la CGT « agit pour une société libérée de l’exploitation capitaliste ». Autant de scandales au regard des « valeurs républicaines », n’est-ce pas ?
Quand l’UMP exige une allégeance à la propriété privée
Pour les signataires de la position commune sur la représentativité, le critère lié au « respect des valeurs républicaines » devait permettre d’interdire les organisations liées au FN.
Dans le cadre de la position commune approuvée, au printemps 2008, par la CGT, la CFDT, le Medef et la CGPME, la notion du « respect des valeurs républicaines » était bien définie : « Le respect des valeurs républicaines implique le respect de la liberté d’opinion, politique, philosophique ou religieuse, ainsi que le refus de toute discrimination, de tout intégrisme et de toute intolérance. » Dans l’esprit des syndicats, il s’agissait en réalité de prolonger la jurisprudence permettant, sur la base d’un arrêt du 10 avril 1998 de la chambre mixte de la cour de cassation, la dissolution des « syndicats » liés au Front national « prônant des distinctions fondées sur la race, la couleur, l’ascendance, l’origine sociale ou ethnique ». Voilà ce que sont, aux yeux des signataires de la position commune sur la représentativité, les « valeurs républicaines » exigibles pour les syndicats…
Le problème, c’est que, lors de la transposition législative de l’accord, les parlementaires UMP et le gouvernement ont obstinément refusé d’adopter les précisions manifestement indispensables, au vu de la procédure engagée aujourd’hui par la direction de SFR. Tous les amendements présentés par le PCF et les Verts sur ce point spécifique de la loi ont été retoqués. « Il ne me semble pas opportun de réduire la notion de “respect des valeurs républicaines” à l’inventaire dressé dans ces amendements, avait expliqué en séance Jean-Frédéric Poisson, rapporteur UMP du projet de loi sur la représentativité. La Déclaration des droits de l’homme ne fait-elle pas aussi référence à la résistance à l’oppression et au respect de la propriété privée ? La définition que vous proposez n’est pas contestable sur le fond, mais elle est limitative. » C’est dans cette brèche que s’engouffre SFR aujourd’hui et où d’autres directions d’entreprise pourraient être tentées de la suivre demain. Responsable du pôle juridique à Solidaires, Thierry Renard dénonce ce flou entretenu volontairement. « Il y a là un risque de normalisation citoyenniste des syndicats : on établit des délits d’opinion et on essaie, au fond, d’effacer les prétentions de transformation sociale des organisations syndicales. »