Le nucléaire britannique s’entrouvre aux Chinois


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Énergie et Environnement

27/02 |

Stefan Wermuth

Le Royaume-Uni pourrait bientôt accueillir des financements chinois pour renouveler son parc nucléaire vieillissant, face au retrait complet des acteurs britanniques du secteur, alors que Londres estime à 200 milliards de livres (230 milliards d’euros) les investissements énergétiques nécessaires d’ici 2020.

Le français EDF, devenu en 2008 l’acteur dominant du nucléaire britannique avec le rachat de British Energy, a confirmé en janvier qu’il menait des discussions avec China Guangdong Nuclear Power Company (CGNPC), afin de construire les premiers réacteurs au Royaume-Uni depuis les années 1990.

La participation de CGNPC est devenue encore plus probable quand Centrica, dernier groupe britannique du secteur, a annoncé qu’il n’exercerait pas son option lui permettant de prendre une part de 20% dans quatre nouveaux réacteurs, aux côtés d’EDF.

Le secteur nucléaire britannique a aussi subi le retrait des allemands RWE et E.ON, qui ont vendu l’an dernier leur projet Horizon au japonais Hitachi. Berlin a décidé de sortir entièrement de l’énergie atomique d’ici 2022, à la suite de l’accident de la centrale japonaise de Fukushima, en mars 2011.

La Chine compte à l’inverse élever sa capacité de production nucléaire à 42 gigawatts (GW) d’ici 2015, soit plus de trois fois son niveau actuel.

HOSTILITÉ DES ÉTATS-UNIS

Mis à part Hitachi et EDF, qui fait par ailleurs face à une hausse imprévue de ses coûts dans la construction de la centrale française de Flamanville, le nucléaire britannique ne peut sur le moment compter que sur un projet commun de GDF Suez et de l’espagnol Iberdrola.

L’entrée éventuelle de groupes chinois dans le nucléaire est toutefois accueillie avec méfiance par plusieurs responsables politiques britannique, notamment du Parti conservateur, dont est issu le Premier ministre David Cameron.

Certains élus recommandent de suivre l’exemple des États-Unis, principal allié de Londres, qui envisagent d’adopter des lois plus sévères pour protéger leurs entreprises de leurs homologues chinoises, notamment après plusieurs cyberattaques attribuées par Washington à Pékin.

« Je pense que les États-Unis abordent la question en gardant les yeux ouverts et en restant pragmatiques en matière de sécurité », juge Mark Pritchard, élu conservateur au Parlement britannique.

Mark Pritchard est membre d’une commission parlementaire qui enquête sur la participation d’entreprises étrangères à des projets liés à la sécurité nationale britannique, dont un partenariat entre BT et le chinois Huawei.

En France, l’Inspection générale des Finances vérifie actuellement qu’un précédent accord de coopération entre EDF et CGNPC, signé en novembre 2011, respecte les intérêts stratégiques du pays.

DYSFONCTIONNEMENT À HONG KONG

Le gouvernement britannique semble cependant s’écarter de la ligne américaine, et a déjà accepté que des groupes chinois contrôlés par Pékin prennent des parts minoritaires dans l’aéroport londonien de Heathrow, le plus important d’Europe, ainsi que dans Thames Water, qui distribue de l’eau à 14 millions de Britanniques.

« La Chine est un partenaire commercial du Royaume-Uni avec qui les échanges représentent déjà des millions de livres », estime Richard Ottaway, un autre parlementaire conservateur. « Que l’on parle de produire de l’électricité ou de construire des voitures, je ne vois pas de différence. »

Les détracteurs de CGNPC lui reprochent en particulier de ne toujours pas avoir donné de détails sur un dysfonctionnement dans une centrale hongkongaise en 2010.

La Chine rappelle de son côte qu’elle n’a jamais connu d’incident noté au-dessus de 2 sur l’échelle internationale des événements nucléaires (Ines). Fukushima a été évalué à 7, la note maximum.

Certains analystes estiment qu’une réussite éventuelle d’un partenariat au Royaume-Uni entre EDF et CGNPC encouragerait de nouveaux investissements chinois dans le secteur, alors que les entreprises contrôlées par Pékin disposent de 20 à 40 milliards d’euros pour leur expansion internationale, selon des calculs du cabinet PWC.

« Nous allons probablement assister dans le monde à une évolution dans laquelle les entreprises chinoises prendront des parts dans des consortiums liés à des technologies qu’elles contribuent à élaborer chez elles », explique George Borovas, spécialiste du nucléaire international chez le cabinet d’avocats Pillsbury.

« Le Royaume-Uni pourrait être l’un des premiers à y assister, ce sera un ballon d’essai », ajoute-t-il.

 

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