Vers une meilleure protection des captages d’eau potables ?


Le Conseil économique, social et environnemental a adopté l’avis « La gestion et l’usage de l’eau en agriculture », mardi 23 avril. Le document met l’accent sur la protection des points de captages d’eau potable.

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« La question ici n’est pas d’établir de quelconques responsabilités mais de rechercher des solutions efficaces pour relever les défis actuels et à venir », a souligné Florence Denier-Pasquier, le rapporteur du projet d’avis « La gestion et l’usage de l’eau en agriculture » du Conseil économique, social et environnemental (Cese). Le Conseil l’a adopté le mardi 23 avril avec 103 votes pour, 21 contre et 46 abstentions.

« Nous sommes allés porter délibérément notre regard sur les territoires les plus fragiles, voire en tension, sur les usages de l’eau, afin d’observer quelles actions les acteurs de terrain mettaient en place« , explique-t-elle.

Ce travail résulte d’une autosaisine de la section de l’agriculture, de la pêche et de l’alimentation proposée au bureau du Cese. Il s’inscrit dans le contexte d’une évaluation interministérielle de la politique publique de l’eau.

Lors de sa présentation, Florence Denier-Pasquier a précisé que l’objectif de ces travaux était « d’assurer une production agricole diversifiée (…) en confortant les revenus et emplois des agriculteurs et salariés, répondre aux enjeux sanitaires, plus particulièrement ceux liés à la ressource en eau potable, concilier les différents usages et activités liés à l’eau (…), identifier la contribution de l’agriculteur à l’atteinte du bon état des eaux (…) et enfin de favoriser l’adaptation de la production agricole aux effets du changement climatique ».

Le groupe a porté une attention particulière à la protection des captages d’eau potable. Le groupe de travail a estimé que le surcoût lié à la pollution des pesticides et nitrates représente un montant 640 à 1.140 millions d’euros par an pour tous les usagers du service d’eau et d’assainissement.

Plus globalement, en 2010, la facture totale pour les dépenses d’eau potable et d’assainissement était estimée à 26 milliards d’euros. Les ménages ont participé à hauteur de 12 milliards d’euros et les entreprises de 9,5 milliards d’euros environ.

Une action adaptée à la vulnérabilité

Les principales orientations de l’avis du Cese s’articulent autour de cinq axes. Tout d’abord, il propose de mener une action adaptée à la vulnérabilité des aires d’alimentation : dans les secteurs qui alimentent directement la ressource captée, une priorité sera donnée à l’agriculture biologique, l’agroforesterie, et la forêt. L’avis souhaite favoriser – y compris financièrement – ces modes de production.

Le second axe vise l’essor des procédés agronomiques, dans les autres territoires, qui permettent de réduire l’emploi d’intrants de synthèse tout en étant économiquement viables pour les agriculteurs. L’idée serait de financer ces alternatives par une redevance progressive sur les intrants de synthèse.

L’avis pointe également la nécessaire réduction de la vulnérabilité des exploitations agricoles aux aléas météorologiques dans un contexte de changement climatique.

Dans son quatrième axe, il préconise une irrigation optimisée et un partage équitable de la ressource, à la lumière des enjeux très différents selon les territoires et les productions.

Enfin, l’avis appelle à une recherche plus transversale sur les enjeux de l’eau et l’agriculture ainsi qu’un pilotage public assuré au niveau national.

Un avis contesté par la FNSEA

Le groupe agriculture du Cese, dont la FNSEA fait partie, a voté contre ce projet d’avis.

« Cet avis est un plaidoyer en faveur d’un modèle agricole particulier, privilégiant les productions biologiques, à bas intrants et de proximité. L’intérêt de ces pratiques n’est pas contestable, reconnaît dans un communiqué, Christiane Lambert, vice-présidente de la FNSEA, ce qui l’est, c’est de laisser penser qu’elles peuvent répondre à toutes les préoccupations de notre société et à l’accès des plus démunis à une alimentation saine et de qualité ; c’est de passer sous silence la diversité de l’agriculture française ».

Pour elle, ces mesures proposées compromettent l’équilibre d’exploitations agricoles, dans un contexte de crise économique. La FNSEA déplore notamment la mise en place de nouvelles taxes aux agriculteurs (taxe sur les engrais, redevance progressive à long terme sur les pesticides, ainsi que sur les prélèvements d’eau).

La Confédération paysanne s’inquiète de la position prise par la FNSEA et du risque de stigmatisation des agriculteurs. Pour elle, la redevance sur les pesticides « serait pourtant un signal fort vers les fabricants de pesticides, sans surcoût pour les agriculteurs« .

« S’il avait été plus radical, l’avis aurait pu proposer l’interdiction progressive d’irriguer les céréales à seule fin d’augmenter les rendements par exemple, pour la réserver aux productions qui en dépendent comme le maraîchage, l’arboriculture et l’horticulture (…), estime l’association France Nature Environnement dans un communiqué, la recherche de consensus, fût-il modeste, est sincère ».

Dorothée Laperche

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