CAPITALE NORMANDE: petit mode d’emploi pour éviter la guéguerre des (petits) chefs !

Sur l’Etoile de Normandie, du côté de nombreux militants régionalistes normands ou simples observateurs lucides et expérimentés de la « matière normande », du côté de nos amis experts du collectif des Quinze géographes universitaires normands, voire du côté des principaux responsables politiques tant en Haute qu’en Basse Normandie (et c’est là qu’on commence à avoir quelques doutes… ) le consensus semble s’établir sur la dure nécessité ou l’enthousiasmante opportunité (selon que l’on soit optimiste ou pessimiste sur l’avenir normand) de faire une métropole-capitale régionale tripolaire en mettant en réseau les agglomérations de CAEN  / ROUEN / LE HAVRE à partir desquelles il serait possible d’animer le grand réseau des petites et moyennes villes qui couvre tous les territoires normands. (En Normandie: une ville de 10000 habitants tous les 20km)

Au moins le ballon d’essai (ou torpille) envoyé par le factotum de Laurent Fabius (alias Mayer- Rossignol) au début de ce mois de septembre, aura permis d’obtenir ce consensus: Rouen est la plus grosse, la plus grande, elle sera la métropole (sur le papier au 1er janvier prochain) mais, à moins de 200 km à l’Ouest de la puissante région parisienne, Rouen n’est pas assez forte pour être le petit Paris de la province normande car il y a aussi Caen et Le Havre et il y a surtout le fait que pendant plus de 40 ans de division normande,

la vraie capitale régionale de la Normandie  c’est PARIS !

Voilà donc où nous en sommes: le moment est donc à ne plus nier la réalité de la géographie urbaine voire la géopolitique… Une métropole-capitale-régionale-unique en Normandie, c’est impossible  ! Et il semble que même un Laurent FABIUS a fini par en convenir !

MAIS IL NOUS FAUT UN CHEF POUR DECIDER DU CHEF- LIEU !

A partir de ce moment là, il faut donc prendre des décisions, prendre la responsabilité (et le courage politique) d’en prendre et de mettre en oeuvre une méthode ou une « feuille de route » pour qu’il soit possible de prendre la responsabilité de prendre des décisions !

Le projet de réforme territoriale déjà examiné en juillet dernier en première lecture au Parlement et qui sera adopté, nous l’espérons tous à la fin du mois de novembre prochain, prévoit, outre la « fusion » normande, que le siège du conseil régional ne soit pas forcément dans la ville où siège le préfet de région: le gouvernement, via la commission des lois de l’Assemblée Nationale, a accepté l’amendement proposé par le député PRG du Calvados, Alain Tourret.

Mais le projet de loi continue de prévoir que le siège du « chef-lieu » de la future région (dénomination aussi désuète que prudente…) soit fixé par décret par le Ministre de l’Intérieur dans le cas où les élus locaux concernés n’arrivaient pas à se mettre d’accord…

Moralité: il ne faut pas être grand clerc pour comprendre que…

1° Il y aura un partage équilibré des rôles et des fonctions entre CAEN et ROUEN

2° Que cet arbitrage aussi subtil que délicat ne se décidera ni à Rouen, ni à Caen et encore moins au Havre mais à Paris, à la place Beauvau (Bernard Cazeneuve) à Matignon (Manuel Valls) et, in fine, au 55 rue du Faubourg Saint Honoré (François Hollande à l’Elysée)

POURQUOI ?

Parce que la France est une caserne centralisée jacobine où les petits chefs n’ont pas l’habitude de prendre des décisions par eux-mêmes et préfèrent se soumettre aux arbitrages, (sinon à l’arbitraire) du grand chef qui règne à Paris: depuis Louis XIV jusqu’à la 5ème République en passant par les deux Napoléon, la France marche ainsi !

C’est le grand chef de l’Etat jacobin depuis Paris qui va imposer le mode d’emploi plus… girondin à tous les décideurs politiques locaux.

L’arbitrage au plus haut sommet de l’Etat central a été nécessaire pour imposer le principe de l’unité normande à tous les hypocrites professionnels d’eux-mêmes qui s’en prévalaient sans la faire pour faire carrière dans le trou normand. 

Il faudra donc un second arbitrage présidentiel et confirmé par décret par le Ministre de l’Intérieur du dossier normand (et non pas du Ministre des affaires étrangères … à la Normandie) pour répartir les principales fonctions entre Caen et Rouen.

Cet arbitrage doit intervenir suffisamment à l’avance avant le démarrage de la campagne des futures élections régionales normandes fixées en décembre 2015, en espérant que ces élections se tiennent bien dans le nouveau cadre territorial normand unique validé à l’automne prochain et surtout pas dans l’ancien cadre de la Normandie divisée: on sait que l’actuelle majorité régionale socialiste aura un mal de chien pour désigner une tête de liste unique qui puisse authentiquement représenter l’idée d’unité normande… Restons prudents et vigilants jusqu’au bout !

Il faudra aussi tenir compte des nouvelles élections cantonales fixées en juin 2015 pour renouveler, avec un mode de scrutin particulièrement baroque, des conseils départementaux qui, finalement, ne vont pas mourir…

Donc, pour éviter la « pollution » (sic!) de ce délicat sujet par une campagne électorale inopportune (Vive la démocratie !°) l’arbitrage élyséen sur le partage des rôles entre Caen et Rouen pourrait avoir lieu au printemps prochain, voire dès cet hiver au sortir du vote solennel de la réforme territoriale à l’Assemblée Nationale, quand sera connu enfin exactement le contenu des compétences qui reviendront aux futures régions et celles qui resteront aux départements: à n’en pas douter, ce sera le démarrage officiel de la campagne électorale pour la future Normandie unifiée…

CAEN / ROUEN / LE HAVRE: jeux de rôles ( jeux pas drôles…)

L’intérêt d’un arbitrage élyséen pour définir qui fera quoi à Rouen et à Caen sur les fonctions essentielles (le conseil régional et ses agences, la préfecture régionale et les agences de l’Etat déconcentré en région) sera d’obliger les élus normands concernés à faire des propositions, à accepter des compromis dans une logique de compensation et d’équilibre parce que le cadre général aura été posé par l’Etat central.

Nous proposions la formule suivante:

CAEN TECHNOPOLE siège du CONSEIL REGIONAL

ROUEN METROPOLE siège de la PREFECTURE REGIONALE

LE HAVRE PORT INTERNATIONAL siège de la CHAMBRE REGIONALE de COMMERCE et d’INDUSTRIE

C’est la distribution des rôles qui pourrait paraître idéale, à l’encontre de la proposition fabiusienne de mettre une préfecture régionale en sursis à Caen pour mieux concentrer à Rouen la réalité du futur pouvoir régional… 

En effet, certains pensent que l’une des conséquences à venir de l’actuelle « MAP » à la sauce hollandaise (Modernisation de l’Action Publique) qui succède à la trop fameuse « RGPP » sarkozyste (car la France doit montrer à l’Europe et donc à l’Allemagne, qu’elle est capable de faire des efforts pour passer sous les fourches caudines des 3% de déficit en part de PIB) sera la suppression des actuelles 22 préfectures régionales au profit d’un nombre plus réduit de préfectures inter-régionales dont le réseau pourrait suivre la nouvelle carte des métropoles.  

Lors de la discussion de la réforme territoriale à l’Assemblée Nationale cet été, Bernard CAZENEUVE nous a assuré que la possible suppression de l’actuel réseau des 22 préfectures régionales serait compensée par un « redéploiement des services de l’Etat déconcentré en régions »: avec un ministre normand à l’Intérieur, c’est le moment rare que les élus Normands ne devraient pas louper pour être enfin plus habiles que nos voisins Bretons !

ROUEN, PREFECTURE INTER-REGIONALE DU NORD OUEST

Ainsi, au lieu de prendre le risque d’envoyer une nouvelle fois des services de l’Etat central vers la future préfecture inter-régionale du Grand Ouest dont le siège serait à n’en pas douter à… Rennes, les Fabiusiens devraient, au contraire, en profiter pour candidater pour la création d’une préfecture inter-régionale du Nord Ouest installée à la préfecture de Rouen pour piloter le futur espace de projets de l’Axe Seine qui concernera toute la Normandie, l’Ouest francilien et la future région Nord-Picardie (avec le canal Seine-Nord-Europe)…

Si l’on veut que les grands ports normands de l’Axe Seine aient une réelle maîtrise de leur hinterland naturel (c’est à dire les 11 millions d’habitants de la région parisienne), il faut une préfecture inter-régionale du Nord-Ouest à Rouen.

LE SCENARIO LE PLUS PROBABLE:  un réseau métropolitain normand à « plus fort la pouque ! »

Imaginons que l’Etat confirme par décret le choix de la métropole de Rouen comme « chef-lieu » de la future Normandie unifiée, avec l’hôtel de Région et la préfecture régionale ou inter-régionale, tout l’enjeu sera d’équilibrer la prééminence rouennaise par des compensations pour Caen et Le Havre: l’exemple de la fusion plutôt réussie des Caisses d’Epargne normande (2008) est, à sujet, très éclairant…

Un siège social pour toute la Normandie est établi à Bois-Guillaume dans l’agglomération de Rouen avec une direction spécialisée compétente sur toute la Normandie. Mais une autre direction spécialisée normande existe aussi à Caen. Les deux directions ne sont pas concurrentes, elles sont parfaitement complémentaires au service d’un réseau commun et avec le même nombre de hauts cadres dirigeants. Le redéploiement des activités de la Caisse d’Epargne de Normandie a permis une déconcentration des services sur tous les territoires normands, avec, notamment la création d’un centre d’affaires qui n’existait pas à Saint-Lô et l’ouverture de nombreuses agences locales.

Ainsi, dans le cas où l’hôtel de région ou de préfecture régionale étaient à Rouen (avec la Cour des comptes depuis 2011) on pourrait imaginer des agences régionales et de l’Etat « déconcentré en région » compétentes sur toute la Normandie à Caen et au Havre, en veillant à ce que l’emploi public supérieur ne diminue pas dans ces deux villes pour le seul profit de Rouen.

Par exemple, le profil technopolitain universitaire caennais pourrait justifier la présence à Caen des agences régionales et administrations d’Etat en charge de la recherche scientifique (c’est déjà le cas avec l’antenne caennaise et normande du CNRS) de la prospective économique, technologique, la formation supérieure, le siège d’un ou de plusieurs pôles de compétitivité, etc…

CONCLUSION: construire vraiment  le pôle métropolitain de l’Estuaire du Havre jusqu’à Caen…

Pour permettre une « négo » équilibrée pour jouer avec la future métropole rouennaise une bonne partie de « à plus fort la pouque » dont le résultat doit profiter à toute la Normandie (sinon, la Normandie unifiée risque d’être considérée comme une opération territoriale de restructuration au seul profit de Rouen) il faut IMPERATIVEMENT sortir de la paranoïa localiste actuelle qui stérilise l’avenir autour de Caen, du Havre et de Rouen. 

Le député maire UMP du Havre, Edouard PHILIPPE doit comprendre que le meilleur moyen d’agir contre les actuelles prétentions hégémoniques de Laurent FABIUS sera de faire alliance métropolitaine avec le député maire UMP de Caen, Joël BRUNEAU qui a appelé à la création d’un pôle métropolitain normand réunissant enfin les trois agglomérations.

Choc de simplification oblige, le chef de l’Etat central et jacobin qui impose une belle leçon girondine à tous les cancres du cas d’école normand n’acceptera jamais la création de trois pôles métropolitains en Normandie alors que la loi sur les pôles métropolitains (2005) s’était largement inspirée de l’exemple normand…

AFFAIRE A SUIVRE ! Notamment en suivant les séances de notre séminaire « Normandie » de l’Université Populaire de Caen qui, à partir du mercredi 12 novembre prochain, aura précisément cette question pour sujet d’étude…

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