DII..

L’Espace du Palais, pour une troisième fois. Il semble me
souvenir que celui d’aujourd’hui n’est pas celui d’origine. L’installation de
la centrale des cadres (qui y achètent désormais si peu) modifia de beaucoup le
projet vendu et construit. De quelque chose d’assez simple, encore que mastoc,
l’avide commerce s’arrogea le droit d’arranger ça à sa façon.

Alors, du square Verdrel à Monoprix, la route était courte.
Au fil des saisons et du temps, elle devint de plus en plus triste. Les
municipaux, prompts à l’abandon, fermèrent l’accès à la place Foch. En regard,
les magistrats propriétaires se crurent encore des privilèges et fermèrent le
passage donnant sur la cour du palais de justice. Il y avait là, parait-il,
plus de pirates que de vigies.

Espace ouvert, espace fermé. Qu’en faire ? Allons, cherchez
bien. Ce qui manque ici, c’est un peu d’horizon. Dis, Coco, t’es allé où en
vacances ? Que vous le vouliez ou non, on sera ici sur la Costa Brava. Ou peu
s’en faut. La plage, le soleil, les palmiers, y compris la ferveur mise à y
croire. Passez la monnaie. Oui, monsieur, on prend les chèques-vacances. Une
génération plus tard, que reste-t-il de cette espagnolade ? Des euros
difficiles, guère plus. Par temps d’automne, balayées par la pluie, les
vitrines s’ennuient.

Durant ce temps, ailleurs, la fête battait son plein. Que de
plaisir, que de bonheur ! Ah, on en a dépensé de l’argent au sous-sol ! Mais,
vous le savez, ces choses-là ne durent qu’un temps. Comme dans les églises
d’autrefois, vient le moment d’aller au confessionnal. La contrition, toujours.
Il faut regretter puis expier. C’est ce qui se passe aujourd’hui. Le palais
vide n’est plus à la mode. L’Espagne ou l’Italie encore moins. Les centres
commerciaux, c’est pour le populo. Lequel on le sait n’a plus guère d’argent
pour de pareilles fadaises. Enfin, c’est ce qu’on dit.

Dans les fossés du château, se posera bientôt la question de
la reconversion. Pas tant matérielle que spirituelle (la contre-réforme, si
vous voulez). Dans des lieux revus à la modestie, il faudra inventer. De
nouveau croire à la bonne étoile. Madame Chalamont le disait : le commerce
devient de plus en plus difficile. Que dirait-elle, aujourd’hui, elle qui, cinq
décennies durant, vendit des parapluies. Rien d’autre ? Non. Alors pensez, des
livres !

En attendant, qui hante le vieux palais ? Des déjà plus et
des pas encore. S’il est un lieu où la mélancolie s’installe avec dureté, c’est
dans ces lieux désertés par la passion. Là, oui, en août 2013, on hésite à
choisir entre l’ennui et l’effroi. Même les impressionnistes du musée ont l’air
plus gai, c’est dire. De fait, les amateurs de peinture sidérante (au sens
strict) peuvent se régaler au sous-sol, face au rendez-vous fédératif. Il y a
là, en précaire, une sorte de galerie sombre où on expose de pathétiques
peinturlureurs.

On aurait tort de rire. Même de sourire. Il faudrait plutôt
y voir un signe de reconnaissance. De quoi ? D’un avenir à la mesure : le
médiocre, l’insignifiant, l’indélébile.

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