Délaration du Christain GAUTHIER-conseiller régionale

 

Intervention Christian Gauthier, assemblée plénière consacrée au budget, 16 décembre 2013

 

 

Cher président, chères et chers collègues,

 

En préambule, et concernant l’accord sur la formation professionnelle signé hier, je me permets d’être moins enthousiaste que les propos entendus tout à l’heure. Je serai donc attentif aux suites données à ce texte.

Sur le chapitre de la formation professionnelle continue qui vient de nous être présenté, si on peut noter avec satisfaction un effort supérieur au budget 2013, il n’en reste pas moins que quelques remarques doivent être faites. Cette augmentation est en partie due à une hausse de l’enveloppe pour la rémunération des stagiaires. C’est, de fait, une situation économique de crise mais aussi la politique de l’emploi du gouvernement qui entraînent une hausse du chômage de longue durée, donc de chômeurs en fin de droits. Et les conditions d’indemnisation seront peut être aggravées à la suite de la renégociation de la convention tripartite Etat/Unedic/Pôle emploi. Je serai attentif à ce point lorsque nous débattrons des « décisions modificatives ».

Autres remarques :

  • le programme régional de formation professionnelle continue s’ouvre à de nouvelles formations dans les secteurs émergents, comme l’éolien en mer, ce qui est louable. Encore faut-il souhaiter que se développent parallèlement des formations initiales à hauteur de l’enjeu du développement de l’éolien offshore sur le littoral.

  • Sur les emplois d’avenir. Je m’étais abstenu lors du vote sur l’aide complémentaire apportée aux employeurs et particulièrement sur l’aide au secteur marchand sans contrepartie d’une embauche en CDI. « L’intervention du Conseil régional (je cite) a permis de faire de la Haute-Normandie la première région pour la proportion d’emplois d’avenir dans le secteur marchand » peut-on lire dans le document du budget primitif. C’est ainsi qu’aux 100 euros mensuels d’aides s’ajoutent, pour l’année 2014, la proposition d’étendre le dispositif de soutien à la formation des emplois d’avenir pour les employeurs du secteur non-marchand à ceux du secteur marchand, sans là aussi s’assurer d’un emploi pérenne. Enfin, je prends acte de la volonté de la Région, annoncé dans l’intervention du Président, d’aider des jeunes à financer le permis B, indispensable pour trouver un emploi, particulièrement dans les secteurs du BTP (pour se rendre sur les chantiers) ou de la restauration (horaires), A quoi bon, en effet, former un peintre, un maçon ou un couvreur si ceux-ci restent des mois au chômage après leur formation, faute de mobilité possible (en commission, j’étais intervenu sur ce point, non budgété).

  • Sur l’apprentissage. La Région, je cite « entend, dans un contexte économique peu favorable, poursuivre ses efforts à destination des apprentis et des entreprises, met en œuvre et soutient des dispositifs d’accompagnement qui visent à faire de l’apprentissage une filière d’excellence, attractive et de qualité ».

    Les sommes en jeu sont importantes. S’il ne fallait citer que les aides aux employeurs d’apprentis, elles atteignent 56 millions d’euros. Pour autant, a-t-on évalué sérieusement les résultats de ce mode de formation ? Si le budget primitif prévoit des dispositifs d’accompagnement qualitatif de l’apprentissage mobilisant plus de 1 800 000 euros en crédit de paiement en 2014, il n’en reste pas moins que les dernières études sur les conditions de travail des apprentis datent de 2002 et 2008 (une étude plus récente, qui confirme les résultats de ces dernières a été réalisée par la Jeunesse ouvrière chrétienne – JOC). Ainsi, dans l’analyse des conditions de travail des apprentis de moins de 18 ans (étude de 1997 à 1999, publiée en 2002), il est noté que plus de la moitié des apprentis travaillent plus de 39h ; 43% des apprentis n’ont pas de pause après 4h30 de travail ; 4 apprentis sur 10 portent des charges de plus de 20kg ; 13% déclarent un accident du travail. Cette étude alarmante est confirmée par celle de la Direction régionale du travail datant de 2008. Au terme de cette étude, la direction régionale du travail répartit les apprentis en 4 classes. Seulement 16 % sont dans la classe 1 (conditions de travail et d’apprentissage favorables).

    Il est urgent, dans le cadre d’un accompagnement qualitatif que la Région lance une étude approfondie sur le sujet.

    Dans le cadre du financement et du fonctionnement de l’apprentissage, le budget primitif privilégie les CFA privés. Ainsi, 12 millions d’euros sont prévus en autorisation de programme pour le seul CFA Lanfry. En crédits de paiement 1,3 millions sont prévus pour les CFA publics, 2,6 millions (le double) pour les CFA privés.

    Enfin, il est nécessaire de s’interroger sur l’ensemble de la carte des formations et le risque de monopole du privé pour certaines formations. Exemple  : le projet d’ouverture d’un BTS Etudes et écomonie de la construction à Lanfry, BTS qui n’existe pas dans le secteur public à Rouen.

    Ces questions ne sont pas séparables de la discussion sur le budget car laisser le monopole de formations au privé, c’est obligatoirement orienter les crédits publics régionaux vers le secteur privé, crédits déjà affectés par une baisse de la dotation de l’Etat, dont on peut regretter qu’elle ne suscite pas, sur les bancs de la gauche, les mêmes réprobations aujourd’hui que par le passé.

    En conclusion sur ce point. Il est temps d’évaluer vraiment l’apprentissage qui coûte cher à la collectivité et ne répond pas toujours aux exigences de respect et de réussite des jeunes.

    Ces remarques ne sauraient exempter, bien sûr, le rectorat de ses responsabilités (fermeture de la section Bac pro Technicien en chaudronnerie industrielle du Lycée Fernand Léger à Grand-Couronne par exemple).

     

    Enfin, je tiens à insister sur la remarque faite lors de la déclaration de politique régionale par Jean-Luc Lecomte (président du groupe FDG), concernant l’IDS et sa « relocalisation ». Je ne peux que souhaiter que la Région tienne compte des remarques du CESER à ce propos (le CESER a émis un avis sur ce point demandant une concertation avant toute décision. Avec appui fort de la CGT et de la FSU).

     

    C’est pour toutes ces raisons – aides toujours plus importantes aux employeurs du secteur marchand, dans le cadre de contrats aidés sans contrepartie d’emplois pérennes et engagements financiers importants pour les investissements dans les CFA privés sans, au préalable, une nouvelle étude sur les conditions de travail des apprentis – que je m’abstiendrai sur ce chapitre.

    Merci de m’avoir écouté.

Christian Gauthier, PG

 

 

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